Intervention de Cécile Untermaier

Réunion du mercredi 6 juin 2018 à 18h05
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaCécile Untermaier :

J'exprimerai la position du groupe Nouvelle Gauche. Au cours de la précédente législature, nous avons beaucoup travaillé sur ces questions, une première mission parlementaire ayant été présidée en ce domaine par Claude Bartolone et Michel Winock, avant que nous poursuivions, sous la présente législature, avec des groupes de travail ayant déjà formulé des propositions, ou allant le faire.

Nous sommes donc aguerris sur ces questions. Le Gouvernement aura sans doute fort à faire avec des députés qui ont envie de faire valoir la vision qu'ils ont de la Constitution, et de la place de l'Assemblée nationale au sein de celle-ci. Ils ont envie de voir évoluer cette Ve République robuste, mais qui doit s'adapter, après sa fondation en 1958, à l'Europe, à la mondialisation, au risque planétaire, à l'effondrement de la biodiversité, à la révolution numérique, mais surtout à la crise de la représentativité et aux difficultés que nous rencontrons entre gouvernants et gouvernés, comme l'écrit si bien le professeur au Collège de France Pierre Rosanvallon.

Cela dit, je ferai quelques remarques, conçues pour être constructives.

S'agissant de la Cour de justice de la République, nous nous étonnons en effet qu'à un régime d'exception succède une procédure d'exception. Nous considérons qu'il aurait été plus clair vis-à-vis des citoyens de confier au tribunal de grande instance de Paris, puis à la cour d'appel de Paris – car nous reconnaissons la spécialisation territoriale – le soin de juger les ministres, dans un délai encadré, permettant de répondre rapidement à une situation difficile. Je m'interroge aussi sur la composition de la commission d'enquête préliminaire, qui inclut des membres du Conseil d'État et de la Cour des comptes.

Ma deuxième interrogation porte sur la réforme du Conseil supérieur de la magistrature. Je la salue. Nous aurions aimé pouvoir la réaliser sous la précédente législature. Ne peut-on aller plus loin et imaginer que la procédure d'avis conforme porte sur des propositions formulées par le Conseil supérieur de la magistrature lui-même ? Pour ma part, je n'en envisage d'ailleurs pas la modification.

Enfin, le droit des collectivités constitue une question d'importance. La loi organique devra nous apporter les précisions permettant de savoir si nous allons, non vers une atomisation effective des collectivités, mais dans le sens de la libération attendue de ces collectivités locales ou à statut particulier.

De manière générale, je dirai que je souscris à toutes les propositions formulées par le président Richard Ferrand, en particulier au sujet d'un parlement libéré et éclairé, dans un temps raisonnable, sur les orientations et sur les textes que le Gouvernement entend présenter à l'Assemblée nationale.

Mais je considère que ce texte doit répondre davantage à l'enjeu démocratique auquel nous sommes confrontés. La représentativité connaît une crise forte et inquiétante. Nous devons en prendre la mesure. On ne peut pas considérer que le CESE, rassemblant la société civile organisée comme nous l'a dit son président lundi dernier, puisse faire ce lien avec les citoyens qui relève du travail même de l'élu, local ou national. Je pense que le CESE trouve sa place dans un dispositif où il interviendrait en amont des textes, au stade de l'étude d'impact, qu'il pourrait enrichir. Mais il ne saurait porter la responsabilité d'une représentativité inscrite dans une démocratie continue ou démocratie d'exercice, pour reprendre les termes de Pierre Rosanvallon.

Le chêne n'est solide que jusqu'à ce qu'il casse. Derrière la robustesse de l'actuelle constitution et du projet que vous nous proposez, je vois se cacher une certaine raideur de l'exécutif, et une volonté, de sa part, de consolider sa position. Au XXIe siècle, nous ne devons plus travailler ainsi : c'est dans l'écoute et l'équilibre des pouvoirs retrouvés que nous devons chercher la voie du rassemblement.

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