Ce qui frappe peut-être le plus quand on aborde le programme 134, c'est le foisonnement des acteurs qu'il coordonne et des actions qu'il regroupe. Cette grande variété de dispositifs fait que nous ne pourrons pas tous les passer en revue. Il y en a tant qu'on en vient à se demander combien il faudrait de députés, de collaborateurs, d'administrateurs et de temps pour que l'Assemblée puisse réellement les évaluer chaque année, en estimer l'impact, en connaître l'efficience.
C'est l'architecture de ce programme, et non son exécution budgétaire, proche des prévisions, qui appelle le plus de commentaires. Celle-ci laisse perplexe : pluralité de directions rendant le processus décisionnel relativement flou, incertitude sur les actions à mener, comme en attestent les débats récurrents sur la place de l'action Tourisme ou de l'aide aux transports de presse. Nous appelons à une simplification, quitte à recentrer le programme sur certaines thématiques ou à distinguer plus strictement actions directes et actions des autorités de régulation.
Le coût croissant des dépenses fiscales nous semble également préoccupant. La mission Économie comporte 67 dépenses fiscales, une de plus qu'en 2016, pour un montant estimé de 24,6 milliards d'euros. Certaines sont parfaitement documentées, comme le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Mais, pour beaucoup, l'estimation et le suivi restent insuffisants, comme l'a noté la Cour des comptes à de nombreuses reprises. C'est d'autant plus regrettable que les dépenses fiscales représentent dans la mission Économie l'essentiel des moyens financiers d'intervention et qu'elles constituent un quart des dépenses fiscales totales de l'État.
Comment expliquer, par exemple, le surcoût de 219 millions par rapport à la prévision pour 2017 de la dépense fiscale relative au taux de 10 % applicable aux ventes à consommer sur place ? Comment juger de la pertinence de la vingtaine de dépenses fiscales représentant moins d'un million d'euros ou n'étant même pas chiffrées ? Nous touchons ici aux limites de l'évaluation.
En conséquence, nous appelons de nos voeux une grande revue des dépenses fiscales afin d'identifier les plus efficientes et d'engager le débat sur la rationalisation des moins pertinentes. Nous pensons qu'un paysage plus lisible représenterait une simplification du quotidien des entreprises, objectif poursuivi par cette majorité depuis son installation.
Pourriez-vous nous indiquer les pistes de réflexion à l'étude en la matière ? Vous semblerait-il souhaitable de compléter les documents budgétaires par des éléments de justification au premier euro pour les mesures fiscales les plus significatives, et ce en lien avec des objectifs et des indicateurs repensés, accompagnés de potentielles clauses de revoyure ? Cela viendrait efficacement compléter l'effort engagé dès l'automne dernier, avec l'adoption, dans le cadre de la loi de programmation des finances publiques, de meilleurs instruments de pilotage des dépenses fiscales bornant notamment dans le temps les nouvelles dépenses fiscales créées.
Nous retrouvons cette légère incertitude au niveau des dépenses budgétaires, jusqu'à identifier parfois un enjeu en termes de soutenabilité de l'intervention de l'État.
Il en va ainsi pour Bpifrance. Nous notons que la moitié des crédits prévus pour la financer a été annulée en cours de gestion, sans impact sur l'activité, grâce au recyclage de ressources internes. À court terme, il est évident que cette capacité de recyclage s'épuisera. Pour continuer à garantir le même volume de prêts aux PME – environ 8 milliards en 2017 –, il faut débloquer de nouveaux crédits budgétaires, de l'ordre de 100 à 150 millions par an.
Alors que nous approchons de la préparation du projet de loi de finances pour 2019, pourriez-vous nous indiquer les éventuelles solutions envisagées pour continuer à abonder budgétairement ce fonds de garantie ? Le cas échéant, pouvez-vous nous présenter de potentielles pistes de réflexion sur l'avenir de Bpifrance, le recentrage de son activité sur certains secteurs, en particulier la correction de failles sectorielles ?
La question des crédits du Fonds de développement économique et social (FDES), qui a pour mission d'accorder des prêts à des entreprises en difficulté, est également à nos yeux un sujet central de ce programme. En 2017, la consommation des crédits a représenté 132 000 euros sur une dotation initiale de 100 millions, soit un unique prêt à une entreprise en difficulté. Nous souhaitons souligner, qu'au-delà d'une utilisation potentiellement plus résolue de ces crédits, le maintien d'une dotation annuelle à son niveau actuel reste une nécessité. Le caractère imprévisible des défaillances d'entreprise et les premiers retours sur l'utilisation de ce fonds sur l'année 2018 nous conduisent à exprimer notre attachement à cette dotation.
Que penseriez-vous de l'idée de donner un caractère systématique des reports d'autorisations d'engagement sur cette ligne particulière afin de pallier au mieux le caractère aléatoire de son action ?
Je terminerai par le cas, toujours susceptible de susciter des discussions nourries, de Business France. En trois ans, son budget a chuté de 10 % en lois de finances et de 13 % en exécution. Les effectifs baissent et la demande augmente. L'internationalisation de nos entreprises est pourtant l'une des priorités de cette majorité. Un certain nombre d'entre elles se plaignent d'une hausse des prix des prestations de Business France, qui pourrait être liée à une réduction de ses crédits.
Quelle lecture faites-vous de cette situation ? Dans le cadre d'une montée en puissance de la mission de la BPI et d'une évolution des missions des chambres de commerce et d'industrie (CCI), quels risques identifiez-vous à la fois en termes de doublons et de concurrence avec des acteurs privés ? Quelles réponses préconisez-vous ? Pourriez-vous clarifier le chemin déjà parcouru pour réarticuler les dispositifs de soutien à l'export et nous indiquer les pistes actuellement à l'étude, notamment celles issues des recommandations du rapport Lecourtier ?