L'article 22 porte sur les outre-mer. J'évoquerai plus particulièrement La Réunion, dont je suis originaire.
À La Réunion, le conseil régional est seul propriétaire de tous les centres de formation des apprentis – il n'existe pas de CFA de branche ou privé – et assure l'intégralité des financements. Il convient d'y conforter le travail et l'investissement réalisés depuis une vingtaine d'années, ainsi que les résultats probants obtenus, par l'octroi d'un droit à la différenciation vis-à-vis de la France métropolitaine, notamment en assurant le maintien d'un pilotage fort de la collectivité territoriale localement compétente et en prenant en compte le rôle prééminent de l'interprofession en outremer.
S'agissant des résultats, il faut bien constater que les effectifs ont progressé à La Réunion de 37 % en huit ans, passant de 3 631 apprentis en 2009 à près de 5 000 en 2017, et que le nombre d'organismes gestionnaires de CFA a été multiplié par trois au cours de la même période. En outre, le nombre de formations par voie d'apprentissage à La Réunion est passé de 172 en 2010 à 259 en 2017, soit une évolution sensible de plus de 50 % en sept ans.
La Réunion présente un taux d'insertion durable légèrement supérieur au taux national. L'apprentissage constitue pour le conseil régional le levier majeur d'amélioration de l'accès à l'emploi des jeunes. D'ailleurs, il fait souvent office de pré-embauche.
Le nouveau système proposé par le présent projet de loi a pour objectif de rendre plus efficace l'accompagnement des entreprises. Or, pour celles-ci, le cadre d'intervention actuel de la région Réunion est plus avantageux – en termes de montants attribués comme de périmètre d'éligibilité – que celui qui devrait résulter du présent projet de loi.
En effet, celui-ci dispose que la nouvelle aide unique ne sera versée qu'aux entreprises accueillant des apprentis préparant un diplôme ou un titre à finalité professionnelle équivalent au plus au baccalauréat. Or, à La Réunion, la région accompagne les entreprises quel que soit le niveau de formation des apprentis. Par conséquent, les modalités d'attribution de l'aide unique définies dans le cadre de la réforme entraîneraient mécaniquement l'exclusion de toutes les entreprises ayant fait le choix de miser sur un apprenti de niveau supérieur au baccalauréat. Sur la base des chiffres de 2016, cela exclurait du dispositif 68 actions de formation sur 235.
Il existe donc, pour ce département d'outre-mer, un risque de nivellement par le bas, alors même que tous les acteurs travaillent depuis 2010 en vue de faire de l'apprentissage une véritable voie d'excellence. Il importe de prendre en compte le fait que le niveau de diplôme demeure déterminant s'agissant de l'insertion professionnelle des jeunes. Rappelons également que la région Réunion a créé en six ans trois écoles d'ingénieurs par la voie de l'apprentissage dans les secteurs du numérique et du BTP.
Au sein de l'académie de La Réunion, le nombre de bacheliers progresse régulièrement. Pour la session de 2017, le nombre de bacheliers a franchi le cap des 10 000 lauréats, répartis entre les trois voies d'enseignement comme suit : 45 % dans la voie générale, 27 % dans la voie technologique et 28 % dans la voie professionnelle.
Enfin, le dispositif en vigueur à La Réunion permet d'accompagner les apprentis en matière de restauration, de transport, d'hébergement et d'achat de petit matériel. Le présent projet de loi ne prévoit pas le maintien de cet accompagnement global de l'apprenti. Il propose uniquement la prise en charge du permis de conduire, dont le financement est d'ores et déjà éligible au CPF.
Il faut véritablement maintenir, voire renforcer, le caractère attractif de l'apprentissage pour nos jeunes en outre-mer. Je défendrai plusieurs amendements à cette fin.