Intervention de Nicole Belloubet

Séance en hémicycle du jeudi 3 août 2017 à 15h00
Confiance dans la vie publique — Article 5

Nicole Belloubet, garde des sceaux, ministre de la justice :

… compétences dont on ne voit pas pourquoi on empêcherait la venue à l'Assemblée.

Ces amendements me semblent donc excessifs au regard de l'objectif qui est de préserver la probité des élus. À l'inverse, la rédaction actuelle de l'article 5 instaure des mesures proportionnées, qui, à la fois, tiennent compte des risques de conflits d'intérêts les plus prégnants et y apportent des remèdes.

Toute disposition allant au-delà s'apparenterait à une interdiction professionnelle manifestement excessive, comme l'a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision d'octobre 2013 – nous n'avons manifestement pas la même interprétation de la manière dont les choses se sont agencées. Le Conseil, je vous le rappelle, a censuré des dispositions moins drastiques pour les députés que celles initialement prévues par le Gouvernement. Ces dispositions prévoyaient d'une part l'interdiction d'exercer une activité professionnelle qui n'était pas celle du député au début de son mandat, à l'exception des travaux scientifiques, littéraires ou artistiques, et, d'autre part, celle d'exercer une fonction de conseil quelle qu'elle soit, sauf dans le cadre d'une profession libérale soumise à une statut réglementé et que le député exerçait avant le début de son mandat.

Le risque d'inconstitutionnalité de l'amendement que vous déposez, madame Batho, ne me semble donc pas diminué en raison d'un quelconque changement dans les circonstances de fait. Il est toujours patent qu'une interdiction générale serait excessive au regard de l'objectif que nous poursuivons et qui a été reconnu comme tel par le Conseil constitutionnel, à savoir protéger la liberté de choix de l'électeur et l'indépendance de l'élu ou prévenir les risques de confusion et de conflit d'intérêts.

Les révélations et événements récents ont tout simplement montré qu'il existe des risques de conflits d'intérêts qui, me semble-t-il, sont pris en compte par la rédaction que nous vous proposons de l'article 5.

Au demeurant, je relèverai un paradoxe : cet amendement maintient l'exception pour les professions libérales, telles que la profession d'avocat. Or les arguments avancés pour justifier l'interdiction générale des activités de conseil pourraient tout aussi bien s'appliquer à ces professions qui conduisent par nature à défendre des intérêts privés. Il me semble que la rédaction actuelle de l'article 5 est allée aussi loin que possible dans le cadre constitutionnel existant.

C'est donc la raison pour laquelle j'émets un avis défavorable.

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