Cet amendement prévoit l'interdiction du travail détaché. Nous considérons – et nous ne sommes pas les seuls en France et en Europe – que le travail détaché est un véritable outil de dumping social à l'intérieur des frontières européennes. Ce régime permet à un employeur d'embaucher un citoyen ou une citoyenne d'une autre État membre, de le rémunérer et de payer les cotisations sociales selon les règles en vigueur dans son pays d'origine. En appliquant la directive, le Gouvernement accepte et légitime une concurrence déloyale, importée sur le territoire national. Un employeur peut en toute légalité décider d'employer une personne dont la rémunération sera plus faible que celle d'un travailleur non détaché.
Le nombre de travailleurs détachés en France s'élevait à 516 000 en 2017, ce qui traduit une hausse importante sur un an. Les négociations lancées par Emmanuel Macron n'y changeront rien. Les discussions que Mme la ministre vient de présenter comme un succès sont en fait un échec cinglant : d'une part, la durée maximale du travail détaché a été ramenée à douze mois – ce qui devait être une grande victoire n'en est pas une, mais encore un effet de manche, car la durée moyenne des contrats sur le sol national est de quarante-deux jours seulement ; d'autre part – c'est le point crucial sur lequel le Gouvernement n'a jamais été capable de nous répondre – , la rémunération dépend toujours du pays d'origine du travailleur détaché. Elle varie en fonction des minima sociaux, du taux de cotisations patronales et de l'assiette de calcul de celles-ci dans le pays d'origine. Le Gouvernement accepte donc que des entreprises françaises décident d'appliquer en France le droit social d'autres pays européens, moins protecteur des salariés – la Bulgarie, la Roumanie, la Lituanie, pays dans lesquels les cotisations patronales sont parmi les plus faibles, l'indice de développement humain le moins fort et le taux de pauvreté le plus élevé.
L'article 50 facilite le recours au travail détaché en autorisant des dérogations – nous avons bien lu. Cette mesure est de notre point de vue profondément dogmatique et va à l'encontre des besoins de notre pays et de l'Europe en matière d'emploi. Elle favorise le dumping social et la mise en concurrence des travailleurs. L'Europe que vous construisez n'est pas celle que nous voulons.
Compétitivité, flexibilité : le Gouvernement n'a que ces mots à la bouche, fût-ce aux dépens de l'intérêt général. Vous délivrez un blanc-seing aux entreprises : « Produisez ce que vous voulez, dites-vous, embauchez selon les critères que vous définissez, livrez-vous à une concurrence mortifère, il en restera bien quelque chose » – mais certainement pas pour les salariés et les peuples. Nous nous opposons fermement à votre conception et à la directive européenne elle-même. La France aurait porté une parole forte au niveau européen en décidant unilatéralement de ne plus appliquer la directive. Nous demandons par cet amendement l'interdiction du travail détaché en France.