L'égalité salariale est imposée par la loi, mais, dans ce domaine, nous sommes face à une situation inédite. À ma connaissance, il n'existe aucune autre loi dans notre pays créant une obligation forte et concernant la moitié de la population active qui ne soit toujours pas respectée quarante-cinq ans après son adoption. Toute loi admet certes quelques contrevenants, mais c'est massivement que la loi sur l'égalité salariale entre les femmes et les hommes n'est pas appliquée.
De ce fait, il faut trouver des voies et moyens inédits pour vaincre ce qui ressemble à une fatalité. Dans cet hémicycle, nous savons tous qu'un écart salarial de 25 % pendant toute une carrière se traduit à la retraite par un écart de 37 %, que les 9 % d'écart dit « inexpliqués », qui sont injustifiables, s'entendent à travail égal – signe qu'aujourd'hui, en France, les femmes ne perçoivent pas à travail égal le même salaire que les hommes – et enfin que cette situation qui vient de loin constitue un sujet de société plus global.
Tout le monde comprend que les stéréotypes assimilés dès la petite enfance contribuent à cette situation et que les choix professionnels des jeunes filles s'exercent sur un champ beaucoup plus restreint que ceux des garçons. On a longtemps cru que pour peu qu'elles obtiennent des diplômes plus élevés, les femmes percevraient un salaire plus proche de celui des hommes. Or il ressort du dossier de la direction de l'animation de la recherche, des études et des statistiques – DARES – que nous avons publié il y a quelques jours dans les Rendez-vous de Grenelle que les femmes sont plus diplômées, moins rémunérées et font moins carrière que les hommes. En d'autres termes, le diplôme n'a pas changé la donne.
Des travaux tant français qu'européens ou internationaux le montrent : le premier congé de maternité, puis le deuxième, sont les moments du décrochage, alors qu'ils correspondent, pour les hommes, aux moments de l'accélération. Bref, il y a un problème de représentation, un plafond de verre, plus ou moins intériorisé, tout au long de la vie professionnelle.
On ne traitera pas le problème en s'attachant à tel ou tel aspect. Il faut l'envisager de manière systémique. Pendant des mois, nous avons mené une concertation avec les partenaires sociaux, qui nous ont tous apporté une contribution significative. Nous avons discuté pendant des heures. J'ai observé qu'il y avait de la matière et une grande convergence de vues sur ce sujet, de façon exceptionnelle, avec beaucoup d'engagement.
Nous ne pourrons pas tout traiter ni tout réussir, mais il faut intervenir sur tous les sujets. Il faut des « référents mixité » à l'école, pour travailler sur les stéréotypes liés aux métiers. Nous allons nous pencher ce soir sur les salaires et sur la lutte contre le harcèlement. Il faut aussi s'emparer de certains sujets comme l'égalité des salaires non en pensant qu'ils permettront de résoudre tous les problèmes, mais en les considérant comme des pointes avancées.
Si l'on ne parvient pas à obtenir qu'à travail égal, une femme perçoive le même salaire qu'un homme, comment pourrait-on lui assurer qu'elle aura la même carrière que lui ? C'est pourquoi, dans la discussion avec les partenaires sociaux, nous avons pris comme axe simple et fort de passer d'une obligation de moyens à une obligation de résultat.