Intervention de Danièle Obono

Séance en hémicycle du vendredi 15 juin 2018 à 21h30
Liberté de choisir son avenir professionnel — Après l'article 65

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaDanièle Obono :

Nous en revenons au problème du pantouflage. Un fonctionnaire sert d'abord et avant tout l'intérêt général. Les agents publics le font avec passion et dévotion. C'est souvent grâce à leur détermination que nos services publics ne craquent pas de tous côtés.

Chaque année, un millier de hauts fonctionnaires de l'État quittent le secteur public pour travailler dans le secteur privé, cédant ainsi aux sirènes des intérêts privés au détriment de l'intérêt général. Ces passerelles sont régulières, récurrentes et peu transparentes. Certes, une commission de déontologie a été mise en place afin d'éviter les conflits d'intérêts, mais son activité est très marginale. Elle ne rend que 2 % d'avis défavorables au pantouflage en moyenne.

Par exemple, l'embauche de Pierre Mariani, directeur de cabinet de Nicolas Sarkozy à Bercy, par BNP-Paribas et Dexia, ne semble pas poser problème. Celle de Julien Pouget, conseiller économique de François Hollande, par Total, non plus. Celle d'Emmanuel Macron, inspecteur des finances et membre de la commission Attali par le biais de Rothschild, toujours pas.

Ces cas, qui nous alertent pourtant, sont quelques-uns parmi un grand nombre. Si 50 % des avis favorables sont soumis à conditions, celles-ci ne sont que très rarement respectées. Un exemple : François Pérol, ancien conseiller de Nicolas Sarkozy, a conduit en 2009 la fusion de la Banque Populaire et de la Caisse d'épargne, avant de prendre la direction de la BPCE.

Le pantouflage est favorisé au sein même des instances gouvernementales. À Bercy, le bureau MS3P – mission suivi personnalisé et parcours professionnels – recense ainsi les offres d'emploi venues du privé, souvent d'entreprises du secteur financier, et les destine aux cadres du ministère. Le sociologue François Denord dénonce le fait que 75 % des inspecteurs des finances vont pantoufler au cours de leur carrière.

Si une obligation de service pendant une durée minimale de dix ans pèse sur les diplômés de l'ENA, de nombreuses grandes entreprises privées sont prêtes à racheter le reste du contrat obligatoire afin de bénéficier de leurs compétences, mais surtout de leur connaissance des institutions.

Voilà pourquoi nous demandons l'insertion d'un article additionnel après l'article 65, afin d'interdire à tout ancien fonctionnaire ou agent public d'exercer pendant dix ans une activité de conseil directement ou indirectement liée aux missions de service public attachées à ses anciennes fonctions.

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