Monsieur le président, madame la ministre de l'enseignement supérieur, de la recherche et de l'innovation, monsieur le rapporteur général de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire, mes chers collègues, la conduite d'une recherche publique et privée d'excellence est cruciale pour la croissance et le rayonnement de la France. En effet, seule la recherche peut nous permettre d'être et de rester un territoire d'innovation et d'investissement moteur en Europe.
Quelle est la situation présente ?
Parmi les grands pays de l'OCDE – l'Organisation de coopération et de développement économiques – , la France, en 2015, occupait la cinquième place mondiale pour la dépense de recherche publique ; rapportée au PIB et en y intégrant la recherche et le développement dans la défense, cette dépense représente 0,86 % du PIB, ce qui nous place au-dessus de la moyenne de l'OCDE mais sous les pays leaders et surtout en deçà de l'objectif de Lisbonne, fixé à 1 % du PIB. Depuis 2016, on observe toutefois sans conteste un sursaut tout à fait manifeste de l'effort public de recherche grâce à une augmentation des crédits de la MIRES – la mission interministérielle « Recherche et enseignement supérieur » – , qui porte l'essentiel des financements de la recherche publique.
Mais je ne saurais passer sous silence, avant de présenter mon diagnostic et mes propositions sur la recherche publique, l'insuffisance de l'effort privé en recherche et développement. Ainsi, une fois celle-ci cumulée à la recherche publique, il apparaît que la France a investi 46 milliards de moins que l'Allemagne dans sa recherche en 2014. Quel est donc le problème ?
Stephen Hawking, qui nous a quittés cette année, aimait rappeler qu'en matière de recherche, bien formuler le problème permet déjà souvent de le résoudre. Au fond, le problème est à la fois simple et compliqué. Il est simple car il s'agit avant tout de réelles difficultés d'organisation, de pilotage et de stratégie pour la recherche publique française. Posons les données du problème : qui finance la recherche ? Les universités, les organismes de recherche, mais aussi le PIA – le programme d'investissements d'avenir – , l'ANR – l'Agence nationale de la recherche – , les fonds européens, les contrats d'entreprises privées, les fonds des collectivités locales ; bref, beaucoup de monde ! Or, face à ce maquis d'acteurs, qui pilote stratégiquement et en détail la direction, l'ambition et les moyens, en lien entre évaluation et financement de la recherche ? La réponse : personne ! Qui a les capacités d'agréger les données de financement pour les suivre et pour prévoir l'avenir au niveau de chaque UMR – unité mixte de recherche – , de chaque labo, de chaque université ? La réponse : personne ! On voit que le problème se complique.
Le résultat est que tous les acteurs du système de la recherche publique courent après des moyens tous les ans alors qu'ils portent des projets sur deux, trois, cinq ou sept ans, et n'ont de ce fait pas la visibilité requise dans le temps. La Cour des comptes réitère chaque année son constat d'un déficit d'éléments de synthèse budgétaire sur les crédits consacrés à la recherche par grand secteur scientifique ou par défi, comme la transition énergétique, l'autisme ou encore les cancers pédiatriques.
Pourquoi est-ce grave ? Parce que ce manque de pilotage stratégique bride les retombées économiques de nos avancées scientifiques. Dans des domaines aussi stratégiques que l'espace, par exemple, face à de nouveaux concurrents privés, comme SpaceX dans les lanceurs, nous voyons émerger une réelle menace sur la compétitivité des acteurs français dans ce domaine d'avenir. Un programme budgétaire dédié à la recherche spatiale devrait ainsi urgemment s'accompagner d'une stratégie pluriannuelle claire, avec de vrais moyens pour préparer l'avenir. Au-delà de la recherche spatiale, il y a urgence à créer un cadre de pilotage budgétaire et stratégique global pour la recherche, …