Et comme on ne veut plus le défendre, on décide de le pérenniser. Mais le problème restera le même : cet argent est donné sans contrainte ni aucun contrôle.
Il est donc temps de mettre un bon coup de balai dans ces niches fiscales inutiles, qui représentent de véritables gouffres financiers pour l'État.
Si nous ne partageons évidemment pas l'avis général de la Cour des comptes, qui demande toujours plus de coups de rabot, conformément à une orthodoxie budgétaire bien connue, force est de constater qu'elle pointe de graves irrégularités de gestion dans l'exécution budgétaire, qui en justifient le rejet.
Ce budget a finalement été à l'image de ce qu'est la politique de ce gouvernement et du précédent : sévère avec la quasi-totalité de nos concitoyens, mais très généreuse avec quelques-uns, tels les plus riches des actionnaires. Pour preuve, le budget 2017 a été particulièrement dur envers les collectivités territoriales, puisque les transferts en leur faveur ont baissé de 3 milliards d'euros. À l'inverse, comme je l'ai dit tout à l'heure, il s'est montré plus clément avec les entreprises bénéficiaires du CICE.
L'autre enseignement que l'on peut tirer de ce projet de loi de règlement est que les deux gouvernements concernés ont bénéficié d'un contexte économique extrêmement favorable, mais ont décidé de ne pas en faire profiter la majorité de la population. Avec un taux de croissance de 2,2 %, au lieu des 1,5 % pris comme hypothèse en loi de finances initiale, ce sont pourtant 5,5 milliards d'euros de recettes fiscales supplémentaires qui sont rentrées dans les caisses de l'État. Force est de constater, comme nous le craignions et comme le montre également l'étude de l'INSEE qui nous a été présentée en commission des finances et dont la presse a commencé ces jours derniers à se faire l'écho, que cette croissance n'est en rien due aux politiques menées, par ce gouvernement ou par le précédent, mais qu'on la doit en totalité à un environnement économique mondial très favorable, entré dans une des phases cycliques que le capitalisme connaît, même lorsqu'il est financiarisé.
Ainsi, en 2017, la croissance mondiale a été de 3,7 % et la croissance de la zone euro de 2,5 %, avec un prix du baril de pétrole encore bas. Les deux gouvernements qui se sont succédé auraient pu utiliser ces recettes supplémentaires pour réduire les inégalités ou les investir dans l'économie réelle et dans le pouvoir d'achat. Il n'en a rien été, et pour cause ! Vous avez finalement décidé d'utiliser ces recettes pour améliorer le solde budgétaire, conformément aux injonctions de Bruxelles. Mais je sais bien, en évoquant cette alternative que nous défendons avec La France insoumise, que, sur tous les bancs de cet hémicycle, on se plie à l'orthodoxie budgétaire qui n'admet comme seuls critères valables que la dette et le déficit, qu'il s'agit de ramener forcément en dessous de 3 %, ainsi que le veut la règle d'or, sans même analyser la nature de la dette. On ne fait pas la différence entre une dette pour les générations à venir ou celle contractée en 2008, qui a servi à recapitaliser les banques après la crise des subprimes, qui continue de coûter très cher à l'économie française.
Vu l'importance des coups de rabot qui ont été portés au budget, malgré 5,5 milliards d'euros de recettes supplémentaires, on peut craindre le pire si les recettes s'avèrent finalement plus basses que prévu au cours des exercices budgétaires à venir. C'est d'ailleurs, là encore, ce qui est annoncé par l'INSEE. M. Woerth, tout à l'heure, nous faisait part de ses espoirs que les chiffres sortis de l'INSEE n'aient qu'un caractère provisoire. Pour ce qui me concerne, cher président, je suis très inquiet. Il me semble que nous sommes malheureusement plus proches de la prochaine crise financière que d'une succession d'années marquées par une relance de l'activité et une croissance soutenue.