Intervention de Thomas Rudigoz

Réunion du mercredi 13 juin 2018 à 9h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaThomas Rudigoz :

Le groupe La République en Marche votera contre cette proposition de résolution visant à la création d'une commission d'enquête relative à la lutte contre les groupuscules prônant la violence.

Tout d'abord, une remarque sur la forme. Vous avez, madame la rapporteure, été nommée ce matin, soit le jour même de l'examen en commission, en conséquence de quoi nous n'avons reçu aucun état d'avancement des travaux, pas de rapport intermédiaire, et nous découvrons en temps réel l'objet même de votre proposition de résolution.

De plus, le titre a changé par rapport à la première version, pour élargir le champ d'enquête de la commission, mais pas l'exposé des motifs. Cet exposé est resté cantonné aux événements du 1er mai et donc à la problématique des Black Blocs. Alors, qu'étudiera-t-on ? C'est flou, même si vous venez d'apporter quelques éléments.

Sur le fond, la rédaction de votre texte laisse penser que vous mettez en cause les modalités et les délais d'intervention des forces de l'ordre le 1er mai 2018 à Paris – si je m'en tiens à votre exposé des motifs, les seuls éléments que j'avais pour prendre la parole. Or rappelons que 1 500 membres des forces de l'ordre avaient été mobilisés, et que le bilan a été seulement de quatre blessés légers, dont un policier, contre deux CRS grièvement blessés par des cocktails Molotov l'année précédente.

D'autre part, vous souhaitez mieux comprendre les ressorts de ces mouvances qui prônent l'extrême violence, mais de quels groupuscules parlez-vous ? Vous-même, vous ne les avez pas identifiés dans votre exposé des motifs. Comment cette commission pourrait-elle donc mener un travail structuré et efficace ?

Outre les Black Blocks, va-t-on se pencher sur d'autres mouvements anarchistes, sur l'extrême-droite dans toutes ses nuances, néofascistes, identitaires, nationalistes, ou encore sur des groupuscules relevant du radicalisme islamiste ?

Quant aux mécanismes permettant de les éradiquer, ils existent déjà, et vous le savez, notamment l'article L. 212-1 du code de sécurité intérieure permettant la dissolution d'associations dangereuses pour la sécurité de notre territoire. C'est via cette mesure législative que deux organisations d'extrême-droite, L'Œuvre Française d'Yvan Benedetti et les Jeunesses Nationalistes d'Alexandre Gabriac, avaient été dissoutes il y a cinq ans par le Président de la République. J'estime d'ailleurs que ces mouvements d'extrême-droite sont certainement beaucoup plus dangereux que l'ultragauche car mieux structurés et avec des moyens financiers tout autres.

Pour conclure, je rappelle que, dans son discours du 18 juin 2018 aux forces mobiles de Saint-Astier, le ministre de l'intérieur, ministre d'État, M. Gérard Collomb a affirmé sa volonté de perfectionner les techniques d'interpellation ciblées des fauteurs de trouble. Il a ainsi annoncé, en accord avec la garde des Sceaux, la création d'un groupe de travail qui sera établi d'ici à l'été pour rechercher les moyens les plus efficaces de détecter, interpeller, puis sanctionner les fauteurs de troubles au sein d'un groupe de manifestants, à la lumière des retours d'expérience récents.

Pour toutes ces raisons, il ne nous paraît pas opportun de créer une commission d'enquête relative à la lutte contre les groupuscules prônant la violence, qui, parce qu'elle serait peut-être dictée par des volontés politiciennes sans cap précis, ne saurait rendre des conclusions satisfaisantes.

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