Chers collègues, nous avons rencontré des problèmes d'agenda. Au départ, j'avais déposé une proposition de résolution en mon nom dont l'objet était les violences du 1er mai dernier. Finalement, c'est une proposition de résolution signée par l'ensemble de mon groupe, à l'objet plus large, qui doit être examinée dans le cadre de sa niche parlementaire du 21 juin. J'espère que le fait de ne pas disposer aujourd'hui du pré–rapport ne bridera pas votre réflexion en vue de la séance. Je le dis en particulier pour vous, monsieur Rudigoz, car votre intervention m'a donné le sentiment que ces conditions de forme l'emportaient peut-être, pour vous, sur le fond. Et je pense que vous aurez le rapport suffisamment rapidement pour que vous puissiez le lire d'ici au 21 juin.
Je crois aussi avoir montré mon souhait d'aller au-delà de ces événements déclencheurs du 1er mai, qui, pour la plupart des Français, ont rendu ces groupuscules inacceptables. Le ministre de l'intérieur et les forces de l'ordre annonçaient quelques centaines d'individus, et, finalement, ils étaient plus de 1 200 ! Nous sommes quand même en droit de nous poser quelques questions… Une commission d'enquête est précisément le cadre approprié pour aborder non seulement ce qui s'est passé le 1er mai mais aussi, bien au-delà, j'ai eu à coeur de le rappeler, des phénomènes de violence récurrents – je ne vois pas comment nous pourrions faire abstraction de la nécessité d'une compréhension de cette recrudescence.
Dans un article récemment paru, M. Gilles Le Gendre, membre du groupe La République en Marche, disait qu'il était hors de question que l'on fasse le procès du ministre de l'intérieur. Pourquoi cette crainte qu'éprouve la majorité chaque fois que l'on cherche à savoir et à comprendre ce qui se passe ? Serions-nous donc là pour attaquer le ministre de l'intérieur ? Votre insistance sur ce point révèle plutôt une gêne. J'ai pourtant souhaité, avec mon groupe, ne pas m'en tenir à cette thématique restrictive. Nous ne sommes pas là pour nous juger les uns et les autres et chacun doit balayer devant sa porte. Cette commission d'enquête nous offrira précisément l'occasion de débattre. Elle sera également l'occasion d'évoquer la dissolution des groupes, car il existe des outils juridiques qui n'ont sûrement pas assez été mobilisés. N'ayez donc pas peur de cette commission d'enquête, qui permettra un travail de fond.
Je veux remercier Mme Maina Sage pour les propos qu'elle a tenus au nom du groupe UDI, Agir et Indépendants. Nous nous reconnaissons dans la manière dont vous-même appréhendez les phénomènes, chère collègue. Vous insistez notamment sur la nécessité de préserver le droit de manifester. Évidemment, ce que subissent les riverains et les commerçants n'est pas acceptable non plus, et ne parlons pas de l'impact des violences sur l'image de Paris et de sur le tourisme.
M. Rebeyrotte nous a reproché d'être dans le registre de l'émotion mais, oui, je revendique cette émotion ! Comment ne pas en ressentir quand nous voyons ce que nous voyons ? Quel est donc votre problème avec l'émotion ? Cher collègue, les doggy bags vous inspirent de l'émotion et une proposition de loi. Eh bien, pour notre part, nous ressentons de l'émotion face à la violence, et nous déposons une proposition de résolution ! À chacun ses émotions, nous sommes différents, et je revendique haut et fort notre émotion.
Comme vous l'avez dit, chère collègue Maina Sage, tous les partis doivent se sentir concernés, et les propos que chacun a tenus montrent précisément un besoin de débat.
Mme Vichnievsky, s'exprimant au nom du groupe du Mouvement Démocrate et apparentés, estimait elle aussi que cette proposition de résolution n'était pas opportune, le Gouvernement ayant, estime-t-elle, bien géré les événements du 1er mai, auxquels son propos s'en tenait. J'ai moi-même salué le travail des forces de l'ordre et le choix stratégique fait, qui n'était apparemment pas d'aller à la confrontation, mais ce n'est pas l'objet de cette résolution. Je regrette que le groupe du MODEM ne se sente pas plus concerné.
Je ne peux qu'abonder dans le sens de mes collègues du groupe Les Républicains, puisque nous avons déposé ensemble cette proposition de résolution.
Je remercie également M. Peu. Vous-même, cher collègue, faites partie de ceux des membres d'autres groupes que le mien qui ont exprimé le souhait de revenir sur les événements du 1er mai – vous avez même déposé un texte. Nous éprouvons le même besoin de discuter du problème, et je vous remercie de vos propos constructifs. Vous avez expliqué que les policiers eux-mêmes sont demandeurs d'une commission d'enquête. Nous voyons bien qu'elle répondrait à un besoin partagé par les acteurs, peut-être par les manifestants eux-mêmes. Ceux qui manifestaient pacifiquement et les policiers sont les premiers concernés. Nous-mêmes, parlementaires, sommes peut-être spectateurs, mais nous voulons comprendre non pour tout régler mais pour essayer d'avancer ensemble. Nous sommes donc « en phase », monsieur Peu.
Madame Lorho, je crains que votre étude comparative des violences de gauche et des violences de droite ne soit quelque peu hors sujet. L'existence de groupuscules d'extrême-gauche, que nous ne nions pas, n'est pas notre seul objet. J'ai d'ailleurs voulu, tout à l'heure, tenir un discours apaisant pour qu'aucun groupe ne se sente particulièrement visé. Je rappelle que les commissions d'enquête comptent trente membres ; ce sont donc des représentants de tous les partis qui siégeront dans celle que je propose de créer. Et l'idée n'est pas de faire un procès, nous ne sommes pas ici pour nous substituer à la justice. D'ailleurs, jamais cette proposition de résolution n'aurait pu être examinée si Mme la garde des Sceaux avait fait connaître au Président de Rugy que des poursuites judiciaires sont en cours sur les faits ayant motivé le dépôt de la proposition.
Monsieur Bernalicis, vous souhaitez évoquer la gestion des manifestations et comptez déposer en ce sens des amendements d'ici à la séance. Vous recevrez très bientôt le rapport complet, et nous pourrons les uns et les autres travailler et avancer. Cela étant, nous en sommes d'accord : l'objet de la commission ne peut se limiter aux événements du 1er mai, et il faut, au-delà, aborder les moyens, la gestion, examiner comment on en arrive à ces situations. En tout cas, je vous remercie des réflexions dont vous nous avez fait part. Bien sûr, il s'agit de mieux combattre les actions de ces groupes, et cela peut passer par des réflexions sur le maintien de l'ordre.