Intervention de Julien Aubert

Réunion du mardi 12 juin 2018 à 17h00
Commission des affaires économiques

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJulien Aubert, rapporteur :

Sur le plan moral, je comprends que l'on puisse trouver anormal que des bureaux restent vides durant des mois alors que certaines personnes ne trouvent pas à se loger. Cependant, sur le plan juridique, ces locaux restent la propriété d'une personne qui, conformément à la loi, en fait l'usage de son choix. On peut certes considérer, à l'instar de Pierre-Joseph Proudhon, que « la propriété, c'est le vol », mais un tel raisonnement peut nous emmener très loin… Si vous possédez trois voitures, dont une que vous n'utilisez que rarement, je pourrais ainsi décider qu'elle me serait plus utile qu'à vous et me l'approprier. Mais je pense que vous trouveriez cela injuste, et vous auriez raison, car le droit de propriété ne saurait dépendre du niveau de richesse du propriétaire : soit on protège la propriété, soit on ne la protège pas, mais il n'y aurait pas de sens à ne la protéger qu'à 80 %, par exemple.

Pour ce qui est des locaux à usage professionnel, je n'ai pas étudié cette question de manière approfondie, mais j'ai tendance à penser qu'en l'état actuel du droit, ils sont concernés. Siège de la vie privée, le domicile fait à ce titre l'objet de la protection la plus efficace. Tous les autres locaux, non rattachables à un lieu d'habitation, peuvent donner lieu à la saisine d'un juge, qui ne rendra cependant sa décision qu'à l'issue d'une longue et coûteuse procédure.

Je me souviens du cas d'un propriétaire dont le locataire ne payait plus ses loyers. Ce dernier l'appelait une fois par mois, à minuit, afin de lui indiquer à l'avance quels arguments juridiques il allait employer pour se maintenir dans les lieux, quels arguments lui seraient opposés par son avocat et comment il les réfuterait afin que le tribunal lui donne raison. Enfin, au bout de deux ans et demi, il lui a annoncé qu'il était arrivé au bout de ses recours et s'apprêtait à libérer les lieux – ce qu'il a effectivement fait, non sans avoir préalablement dévasté les lieux. Même si tous les locataires indélicats ne font pas preuve d'une telle perversité, cet exemple a vocation à souligner le fait qu'en pareil cas, le propriétaire ne subit pas un simple préjudice financier, mais aussi un important préjudice moral, pouvant avoir de graves conséquences sur sa santé.

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