Bruno Millienne a déjà dit beaucoup de choses, donc mon propos ne sera pas très long.
Nous partageons les objectifs généraux qui ont été énoncés par Charles de Courson et le groupe UDI, Agir et indépendants. Quant au texte de la proposition de résolution dont nous avons débattu au sein de la délégation aux collectivités territoriales, il appelle plusieurs remarques.
Il est toujours assez savoureux – je ne vise pas Charles de Courson – de voir des députés défendre dans l'hémicycle des mesures qu'ils n'ont pas défendues dans les années précédentes. Il y a quelque chose d'incongru à prôner l'autonomie fiscale ou financière lorsqu'on a fait exactement l'inverse dans le passé. Passons sur ce détail qu'il n'est toutefois pas inutile de rappeler, car il est toujours plus facile de parler de ces sujets lorsqu'on est dans l'opposition. La question de l'autonomie fiscale et financière des collectivités n'est pas nouvelle, elle est lancinante et récurrente. Je reconnais néanmoins certaines avancées.
Cette proposition de résolution pose d'abord la question de la capacité donnée aux collectivités de faire, c'est-à-dire de pouvoir développer des services, de maintenir une capacité d'investissement. Or cette capacité de faire n'est pas forcément liée à l'autonomie fiscale et financière. Cela se saurait !
Nombreux sont ceux qui réclament l'autonomie fiscale. Ce sont d'ailleurs les mêmes qui, dans toutes les campagnes électorales, promettent de ne jamais rendre effectif le levier fiscal. Il faut savoir à quoi sert le levier fiscal s'il n'a pas vocation à être utilisé. L'autonomie que vous appelez de vos voeux est, me semble-t-il, assez virtuelle : on la réclame depuis des années pour finalement ne pas en user.
Dans de nombreux pays, en particulier les plus décentralisés – le modèle est certes différent puisque ce sont des États fédéraux – , c'est une part, très significative, de l'impôt national qui est levée par les collectivités.
Cette proposition de résolution revendique l'autonomie fiscale pour toutes les collectivités. Or les régions sont engagées dans un processus qui relève, selon moi, plutôt de l'autonomie financière. Il en va différemment pour le bloc local. Je ne crois plus au bloc que constitueraient toutes les collectivités – région, département et bloc local. Il me semble que le mécanisme autour de la TVA correspond aux attentes des régions.
J'approuve la nécessité d'un transfert sincère des compétences. Mais, je l'ai dit à Charles de Courson, je considère qu'il faut assumer l'autonomie : une fois que la compétence est transférée, la collectivité s'en saisit et en fait ce qu'elle veut. Je prends l'exemple des régions qui ont eu à gérer les lycées : les régions se sont saisies magnifiquement de leur nouvelle compétence puisqu'elles ont engagé un programme formidable de développement et de rénovation des lycées qui est sur le point de s'achever, trente ans plus tard.
Une collectivité ne peut pas demander à exercer des responsabilités de manière autonome et ensuite réclamer à l'État d'assumer financièrement les conséquences des choix qu'elle a faits au nom de cette autonomie. Elle ne peut pas réclamer que l'État prenne à sa charge le coût des décisions qu'elle a a prises en exerçant ses compétences. Si une communauté de communes prend la compétence scolaire et décide d'y consacrer des moyens, c'est à elle d'assumer ; elle n'a pas à se retourner vers les communes en leur demandant une participation financière supplémentaire.
La différenciation territoriale qui sera abordée dans le cadre de la révision constitutionnelle donnera des leviers sur ces sujets. Enfin, une profonde réforme de la fiscalité locale est en cours d'élaboration. Si nous évoquions ces questions sans penser à l'articulation avec cette réforme, en nous arc-boutant sur l'autonomie fiscale qui n'est pas une réalité et sans réfléchir aux moyens, nous ne ferions pas oeuvre utile.
Pour toutes ces raisons, en connaisseur des collectivités territoriales, comme Charles de Courson et nombre d'entre vous, le groupe MODEM et apparentés ne votera pas cette proposition de résolution en dépit des objectifs intéressants qu'elle poursuit.