Madame la ministre, j'ai écouté avec attention votre exposé, et je n'y ai pas décelé beaucoup de nouveautés par rapport à la politique précédente. Mais tout peut arriver.
Je souhaiterais vous poser, au nom du groupe Les Républicains, deux questions essentielles, sinon pour les diplomates, du moins pour l'opinion publique. À cet égard, je ne voudrais pas que la récente élection présidentielle crée une confusion. Cette élection a, certes, montré que les Français étaient très attachés à l'Europe, mais c'est un vote conjoncturel, qui est intervenu dans un contexte politique particulier marqué par la présence de Mme Le Pen au second tour. Il ne signifie pas pour autant que l'opinion publique est complètement satisfaite de la démarche européenne. Des efforts seront nécessaires dans certains domaines.
Vous avez indiqué que l'Europe de la sécurité était en marche. Peut-être est-ce le sentiment du Quai d'Orsay, mais moi qui suis spécialisé dans les questions de renseignement, je ne perçois pas très bien les progrès accomplis dans ce domaine. Certaines des commissions d'enquête parlementaires créées sous la précédente législature ont ainsi montré que l'Europe du renseignement ne se faisait pas – et je ne parle pas, ici, de la question des transports. Force est de constater qu'en matière de lutte contre le terrorisme notamment, nous restons très dépendants des États-Unis et, de manière générale, des Anglo-Saxons, des Big Five – Grande-Bretagne, États-Unis, Australie, Canada et Nouvelle-Zélande –, qui fonctionnent en circuit fermé. Le renseignement, qui est une question à la fois technologique et politique, nécessite des moyens considérables qui, pour le moment, n'existent pas au niveau européen. Or, je ne vois pas comment nous pourrions créer une Europe de la défense et de la sécurité sans que nos services de renseignement soient autonomes. Nous sommes donc insatisfaits de la politique européenne en matière de sécurité, et de la position de la France sur ce sujet.
Par ailleurs, l'opinion publique est très mécontente de la politique d'immigration. Il suffit d'ouvrir n'importe quel quotidien pour s'apercevoir que, malgré ce que l'on dit de Frontex, la situation en Méditerranée ne s'améliore pas. Au contraire, elle s'aggrave, tant au plan quantitatif qu'au plan qualitatif, pour les pays les plus menacés, c'est-à-dire l'Italie et la Grèce. Mais la France n'est pas épargnée : il suffit de se rendre Porte de La Chapelle ou à Calais pour constater que, dans ce domaine, la politique européenne ne fonctionne pas. Or, la France n'évolue pas. Les Français reprochent à l'Europe d'être souvent discursive et trop peu technique et pragmatique. Nous attendons donc des initiatives concrètes.