Intervention de Pierre Simon

Réunion du jeudi 14 juin 2018 à 11h30
Commission d'enquête sur l'égal accès aux soins des français sur l'ensemble du territoire et sur l'efficacité des politiques publiques mises en œuvre pour lutter contre la désertification médicale en milieux rural et urbain

Pierre Simon :

Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je m'exprime devant vous en tant qu'ancien praticien hospitalier. J'ai exercé à l'hôpital de Saint-Brieuc durant trente-sept ans et, durant toute ma carrière, j'y ai formé des internes en médecine générale. Je vais vous faire part de l'évolution du métier de soins primaires dont j'ai été témoin au cours de carrière hospitalière, grâce aux liens que j'ai gardés avec tous mes anciens internes qui se sont installés – essentiellement dans les Côtes-d'Armor, un département touché par la sous-densité médicale.

Par ailleurs, ayant été pendant plusieurs années président de la commission médicale d'établissement (CME) de l'hôpital de Saint-Brieuc, j'ai également assisté à l'évolution du service des urgences, en particulier à partir de la grève du début des années 2000. Je pourrai donc témoigner des conséquences sur le fonctionnement hospitalier du changement de pratique professionnelle pour les soins primaires, intervenu à partir des années 2000.

Enfin, j'ai un regard national sur l'évolution de la télémédecine, puisque j'ai terminé ma carrière au ministère de la santé comme conseiller général des établissements de santé (CGES) et que j'ai rédigé avec Dominique Acker, en 2009, un rapport ministériel sur la place de la télémédecine dans l'organisation des soins ; à ce titre, j'ai travaillé sur l'article de la loi du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires (HPST) relatif à la télémédecine, puis sur le décret d'application publié le 19 octobre 2010. Je précise que je suis également juriste et que c'est à ce titre que j'ai été présent pendant trois ans au ministère de la santé. J'ai ensuite repris, en 2010, la présidence de la Société française de télémédecine que j'avais créée en 2006, pour la laisser en 2015 au professeur Thierry Moulin, que vous avez auditionné au mois d'avril.

Au cours de ma carrière, j'ai pu constater les difficultés d'accessibilité à des médecins, puisque j'ai également eu la responsabilité de la conférence des présidents de CME de Bretagne, ce qui m'a permis de porter un regard sur l'ensemble de cette région. Pour moi, le problème de l'accessibilité existe depuis au moins une quinzaine d'années : il a pris naissance en 2003 quand on a reconnu la spécialité en médecine générale, ce qui a conduit nos collègues de soins primaires à s'organiser comme des médecins spécialistes, c'est-à-dire à prendre des rendez-vous et à ne plus se déplacer à la demande non programmée, comme cela se faisait couramment au XXe siècle.

L'assurance maladie avait choisi de financer des urgences hospitalières, afin que les patients non programmés se présentent aux urgences de l'hôpital – ce qui s'est mis en place progressivement, jusqu'à la situation que l'on connaît actuellement. La non-accessibilité pour le non-programmé est aujourd'hui devenue un problème majeur en raison de l'importance prise par les maladies chroniques, qui nécessitent des consultations programmées, mais suscitent également chez les patients le besoin d'obtenir des réponses dans un cadre non programmé : c'est ce dernier aspect que nous maîtrisons mal, ce qui peut donner l'impression à la population d'être mal prise en charge, voire d'être en danger.

L'un des marqueurs de cette situation est le nombre d'appels au centre 15, qui a pratiquement doublé en quinze ans, avec aujourd'hui plus de 30 millions d'appels par an – alors que l'on compte moins de 700 000 urgences vitales. La population exprime un besoin de conseil médical ayant deux origines : d'une part le vieillissement, qui augmente le nombre de patients atteints de maladies chroniques, d'autre part l'arrivée du smartphone en 2007, qui nous a rapidement fait évoluer vers une société de l'immédiateté, où chacun veut pouvoir joindre un médecin quasi instantanément. Or, les médecins ont du mal à répondre à cette demande, car ils se sont toujours organisés selon le système du rendez-vous – il faut reconnaître qu'ils ne sont pas les seuls, et que l'on imagine mal des juristes, par exemple, faire du conseil juridique instantané… En tout état de cause, ni la faculté ni les stages effectués par les médecins ne les préparent à cette pratique de la médecine immédiate.

En ce qui me concerne, j'ai des solutions à apporter au moyen de la télémédecine, et je me tiens à votre disposition pour vous les présenter.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.