Intervention de Benoît Assémat

Réunion du mercredi 13 juin 2018 à 11h00
Commission d'enquête sur l'alimentation industrielle : qualité nutritionnelle, rôle dans l'émergence de pathologies chroniques, impact social et environnemental de sa provenance

Benoît Assémat, conseiller sécurité sanitaire au département risques et crises de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice (INHESJ) :

Les Européens n'ont pas la même façon de penser l'hygiène et la salubrité des aliments que les Américains, ce qui a notamment donné lieu à un débat sur le poulet au chlore. Les Américains trouvent qu'il est normal d'assainir le poulet de cette manière. Nous ne sommes pas dans cette logique-là : nous estimons que les choses doivent être bien faites du début à la fin, depuis la récolte du lait – si l'on fabrique des fromages au lait cru – ou même de l'élevage de l'animal jusqu'au consommateur. C'est ce qui fait la solidité de notre modèle, lequel est néanmoins bousculé par la mondialisation. À l'autre bout du monde, on ne fabrique pas les aliments dans les mêmes conditions sanitaires, sociales et environnementales que chez nous. L'utilisation des antibiotiques ou des produits phytosanitaires varient d'un continent à l'autre. Or tout circule librement. Que faire ? C'est une question vraiment très politique.

Pour ma part, je pense qu'il faut miser sur l'information des consommateurs. Certes, Nutri-Score a montré que l'exercice n'était pas facile. Il faudrait réussir à associer un ensemble d'éléments qui répondent aux enjeux de santé et de respect de l'environnement. Ce serait une manière de progresser. Mais les coûts indirects, les externalités négatives liées à certains modes de production ne sont jamais pris en compte par les vendeurs. Comment intégrer toutes ces externalités négatives dans le coût de produits comme le panga ? Je n'ai pas de réponse.

D'aucuns réfléchissent à une « exception agri-culturelle ». Est-ce pertinent ? Il y a vingt ou trente ans, la France était en avance dans la défense de l'exception culturelle. Vu la place de l'agriculture et de l'alimentation dans notre pays, la France ne pourrait-elle pas lancer la réflexion sur l'« exception agri-culturelle » ? Je ne suis gêné pour répondre à la question car je sortirais de mon champ d'expertise. Or je ne suis pas venu ici en tant que citoyen mais en tant qu'expert.

Quoi qu'il en soit, il faut jouer sur la responsabilité de tous les acteurs de la chaîne alimentaire et sur la possibilité d'informer les consommateurs. Actuellement, aucune information n'est donnée sur les caractéristiques nutritionnelles des produits ou sur les contraintes liées à leur production. Formellement, les produits importés doivent respecter certains critères : lorsqu'ils entrent sur le territoire de l'Union européenne, ils font l'objet de contrôles aux postes frontaliers. Ces contrôles, assurés par les services des douanes et les autorités sanitaires, répondent aux critères fixés par l'Europe. Mais à ce stade, on voit seulement le résultat final d'un processus et non pas l'ensemble de la chaîne de production. Ces contrôles ne sont pas pour autant inutiles puisque certains produits sont interdits. La DGCCRF et la DGAL pourront vous détailler le dispositif très complexe destiné à ne laisser entrer sur le territoire de l'Union européenne que des produits qui répondent à des critères précis.

Cela étant, les produits ne répondent pas de la même façon à tous les critères de production. Comment faire ? C'est vous qui avez la réponse. Pour ma part, je crois qu'il faut donner aux consommateurs la possibilité d'être informés, instruits et responsabilisés. À partir de là, ils pourront choisir des produits qui répondent à des exigences sanitaires, environnementales et sociales.

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