Merci de cette question, je ne suis pas compétent sur tous les aspects, mais je commencerai par ceux qui ont été au centre de beaucoup de préoccupations : les bisphénols.
Nous avons bien caractérisé l'exposition de la population au bisphénol A. Les interdictions successives ont déplacé le problème vers d'autres substances analogues. On le voit sur des mesures d'imprégnation du bisphénol S, du bisphénol F, on parle aussi du bisphénol B. Nous n'en avons donc pas encore terminé avec les bisphénols, nous aurons encore beaucoup d'échanges.
Les phtalates incluent beaucoup de molécules, pas uniquement le phtalate de di-2-éthylhexyle – diethylhexyl phthalate (DEHP). Ce sont des perturbateurs endocriniens reconnus, notamment antiandrogènes. Nous savons assez bien caractériser l'exposition d'une population et, d'après les conclusions de l'ANSES, elle n'est pas trop préoccupante. Mais il faut être très prudent s'agissant de perturbateurs endocriniens. Vous en avez peut-être discuté avec l'ANSES : la relation dose-effet n'est pas toujours linéaire, on note parfois des rebonds à basse dose. Avec les nouvelles connaissances en toxicologie, nous ne savons pas exactement ce qu'entraîne une faible exposition : les réponses non-monotoniques et courbes en « U » montrent un effet supérieur à basses doses.
Concernant les encres, les MOH et les hydrocarbures saturés d'huiles minérales – mineral oil saturated hydrocarbons (MOSH), nous avons très peu d'informations sur notre exposition en raison d'une difficulté analytique : ce sont des mélanges extrêmement complexes de centaines de composés. Nous butons sur le savoir-faire en termes de mesure des niveaux de contamination, et d'un point de vue toxicologique, il est très délicat de fixer une dose journalière tolérée à un mélange de molécules. C'est un sujet émergent dont il va falloir se saisir. Vous n'avez pas évoqué les substances non ajoutées intentionnellement – non-intentionally added substances (NIAS). Ce sont des matériaux utilisés dans les boîtes de conserve, par exemple des vernis, sur lesquels nous ne savons rien. Des projets de recherche sont en cours, mais ce sujet est loin d'être maîtrisé. À défaut d'un sujet d'inquiétude, c'est un sujet d'intérêt.
Je suis beaucoup moins « pointu » sur la question du recyclage. Il me semble que pour qu'un emballage soit qualifié pour le contact alimentaire, il doit passer certains tests. En particulier, des limites de migration spécifique sont vérifiées. Qu'un matériau soit composé à 25 %, 50 % ou 100 % de matières recyclées, il doit respecter les normes au même titre qu'un plastique fraîchement préparé. Les limites de migration spécifique permettent donc de déterminer ce qui est sanitairement correct.
Les composés perfluorés sont des substances utilisées sur les plaques de cuisson, les poêles, dans les produits antitaches et les imperméabilisants de chaussures et de vêtements. Ces composés migrent, on peut les retrouver dans les aliments. Selon les conclusions de l'ANSES, il n'y a pas de problèmes de surexposition des populations. Même si la dose journalière tolérée a été revue à la baisse récemment, elle n'est pas dépassée. Nous nous sommes beaucoup inquiétés de ce groupe de substances, finalement les conclusions sont plus rassurantes qu'on ne le pensait.