Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du lundi 31 juillet 2017 à 11h30
Commission des affaires sociales

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Comme vous, madame Wonner, j'ai la conviction que les dispositifs d'insertion par l'économique jouent un rôle extrêmement important, et qu'il est nécessaire de développer la dimension « formation » de ces dispositifs. Nous aurons l'occasion de reparler de la formation professionnelle dans quelques mois, dans le cadre d'une future réforme, et je suis tout à fait disposée à étudier en amont la prise en compte de dispositifs du type de ceux que vous évoquez.

Il est fondamental, pour des demandeurs d'emploi de longue durée ou pour des jeunes n'ayant jamais eu accès ni à la qualification ni à l'emploi, d'acquérir de l'estime de soi, de prendre progressivement confiance, de comprendre les mécanismes du marché du travail et d'apprendre à s'y intégrer – et, bien entendu, de se former. Même quand elle n'existait pas à l'origine, la demande de formation peut toujours être formulée ultérieurement dans le cadre des dispositifs d'insertion par l'économique.

L'une des difficultés qui se présentent aujourd'hui est que l'on se trouve soit dans le cadre du contrat aidé, soit dans le cadre de la formation, soit dans le cadre de l'insertion par l'économique – ce qui s'explique par le fait que ces différents dispositifs ont chacun leur justification et leur spécificité, mais peut être source de difficultés pour l'accompagnement des personnes concernées, car cela implique de recourir, pour chaque dispositif, à une boîte à outils qui lui est propre. Cela fait partie des sujets sur lesquels nous devrons réfléchir.

Madame Firmin Le Bodo, vous attendez de nous une réforme « donnant plus de protection là où c'est nécessaire et plus de libertés chaque fois que c'est possible » et qui ne fasse pas penser, si j'ose dire, à de l'eau tiède. Comme vous l'avez constaté, les premières annonces au sujet de notre réforme ont donné lieu à des réactions assez vives, ce qui est normal en démocratie, mais montre bien que ce n'est pas de l'eau tiède que nous vous proposons !

Je considère que la réforme proposée, impliquant une concertation, un débat parlementaire et, pour finir, des changements profonds au sein des entreprises, n'a de sens que si elle se traduit, au bout du compte, par plus de liberté et plus de protection. Les deux notions ne sont pas exclusives l'une de l'autre, car il peut s'agir de libérer les entrepreneurs comme les salariés – parfois simultanément, comme dans le cas du télétravail ; de protéger les salariés, mais aussi les entreprises. Cette réforme, qui implique d'aborder de nombreux sujets, notamment celui de l'assurance chômage et de la formation, ne peut se faire qu'au moyen du dialogue social, qui constitue la clé d'un progrès équilibré. C'est le fil rouge qui guidera les arbitrages rendus sur les différents textes.

Monsieur Michels, vous m'avez interrogé sur les principaux points de blocage possibles. J'en vois, pour ma part, deux. Le blocage peut provenir, en premier lieu, d'une incompréhension de notre travail. Nous nous sommes en effet attelés à un projet d'ordonnances très ambitieux, qui produira tous ses effets sur le long terme, mais ne changera pas nécessairement les choses comme par magie, du jour au lendemain.

Cela nécessite donc des explications, car les gens ne savent pas nécessairement comment fonctionne aujourd'hui le droit du travail. En ce sens, le débat public, alimenté depuis deux mois par les parlementaires, les partenaires sociaux ou les journalistes, est une bonne chose. Si l'on veut éviter que le processus ne se grippe, il est important en effet que nos concitoyens comprennent clairement quel est le chemin que nous empruntons, pour résoudre quels problèmes, dans quelle perspective et avec quelles ambitions pour le dialogue social, l'entreprise et les salariés. Libre à chacun ensuite de se forger une opinion, favorable ou non.

Par ailleurs, sur le fond, on ne peut occulter les risques de blocage que représente la question de la négociation dans les entreprises de taille intermédiaire (ETI), c'est-à-dire de cinquante à trois cents salariés. Il sera complexe en effet de parvenir à une solution qui facilite le dialogue social au sein de l'entreprise même en l'absence de représentation syndicale, tout en préservant les prérogatives des organisations salariales. Nous n'avons donc pas encore abouti sur cette question, mais je suis confiante car, sans préjuger de l'avis des uns et des autres, nous avons déjà beaucoup progressé.

Au-delà de ces deux éléments que je viens de souligner, il restera évidemment dans cette réforme des sujets d'accord et de désaccord, et nous ne nous attendons guère à un plébiscite. L'essentiel à nos yeux reste de parvenir, grâce au dialogue social, au meilleur équilibre entre liberté et protection. C'est notre fil rouge.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.