Comment le dialogue social va-t-il permettre l'évolution de l'entreprise ? L'instance fusionnée aura davantage de « grain à moudre » ; employeur et salariés auront une vision plus large, et des marges de manoeuvre accrues. Cela amènera logiquement un renforcement de son pouvoir de discussion.
En outre, là où les syndicats de salariés et l'entreprise le souhaitent, un accord majoritaire pourra créer un véritable « conseil d'entreprise », qui deviendrait le lieu non seulement de l'information et de la consultation, mais aussi de la négociation. Ainsi, dans certains domaines – sans doute en priorité la formation – on rentrerait dans une logique d'avis conforme, c'est-à-dire de co-décision. Cela ne concernera sans doute dans un premier temps qu'une minorité d'entreprises. Nous n'obligeons personne, mais je connais beaucoup d'employeurs et d'organisations syndicales qui sont prêts à tenter ce pari. C'est une étape logique de l'évolution du dialogue social et économique dans notre pays.
Le Sénat a d'ailleurs adopté un amendement qui vise à renforcer l'association des représentants des salariés aux décisions en matière de formation, mais aussi à inclure parmi les compétences de l'instance unique la question des personnes handicapées et celle de l'égalité hommes-femmes. Ces trois sujets – qu'il est obligatoire de traiter – sont en quelque sorte des marqueurs de la maturité du dialogue social.
S'agissant de la gouvernance, le Sénat a en effet supprimé – contre le souhait du Gouvernement – l'alinéa qui prévoyait l'amélioration des conditions de représentation et de participation des salariés dans les organes d'administration et de surveillance. Le projet de loi est maintenant entre les mains de la commission mixte paritaire…
La formation ainsi que la reconnaissance des acquis et des parcours syndicaux sont essentiels pour les partenaires sociaux. Aujourd'hui, un représentant du personnel ou un délégué syndical voit parfois, voire souvent, sa carrière entravée. Dès lors, les organisations syndicales rencontrent des difficultés pour recruter et renouveler les générations ; c'est contraire à ce que nous souhaitons. Comme je l'ai dit, j'ai confié une mission sur ce sujet à M. Simonpoli, qui est un expert reconnu de la question, et qui me rendra ses conclusions d'ici peu. On ne peut pas vouloir un dialogue social renforcé sans donner aux représentants du personnel les moyens de jouer pleinement leur rôle. C'est une question de cohérence : nous ne défendons pas un modèle d'entreprise sans syndicats, mais un modèle où un dialogue s'établit entre l'employeur et les représentants des salariés. Il faut en outre prendre en considération les spécificités des PME. Les ordonnances contiendront des mesures visant à renforcer le fait syndical.
Des débats au Sénat, mais aussi à l'Assemblée nationale, et de nos discussions avec les partenaires sociaux, nous avons notamment retenu la nécessité d'un équilibre très fin sur les sujets d'hygiène, de santé et de sécurité au travail. Nous nous acheminons vers des solutions qui nous permettront de gagner sur les deux tableaux : plus de réflexion stratégique, mais aussi une meilleure préservation de l'acquis opérationnel.
S'agissant des indemnités légales, elles sont fixées par décret. Nous entendons établir les nouvelles règles dans la foulée des ordonnances. Les montants actuels sont en effet inférieurs à la moyenne européenne. Les organisations syndicales de salariés approuvent notre intention ; du côté des organisations patronales, certaines l'approuvent, d'autres la regrettent.
Mais notre but n'est pas de faire plaisir à l'un ou à l'autre. Le gagnant-gagnant, ce n'est pas la même chose que le donnant-donnant ! Ce que nous voulons, c'est un ensemble à la fois cohérent et équilibré. Dès lors, il est logique d'augmenter les indemnités légales, mais aussi de plafonner les dommages et intérêts. Nous avons écouté tout le monde ; mais notre but, je le redis, c'est la cohérence. Nous ne voulons pas plaire, mais agir de façon à la fois efficace et juste ; nous voulons libérer et protéger.
Il existe aujourd'hui cinq cas – une simplification sera bienvenue – où l'accord d'entreprise prime sur le contrat de travail, le salarié qui refuse l'accord d'entreprise étant de facto licencié. Cet accord ayant été signé par les organisations syndicales, il est normalement plutôt favorable ; mais si un salarié le refuse, et qu'il est licencié, la piste du compte personnel de formation me paraît en effet intéressante. Les modalités restent à fixer.
La vraie sécurité de l'emploi, au-dessus de toutes les autres, c'est la compétence et la formation. Elles seules permettront aux actifs d'être acteurs des mutations, et non de les subir. Tout ce que nous pourrons faire pour renforcer la formation ira dans le bon sens. Nous voyons de plus en plus souvent des entreprises qui doivent renoncer à des marchés parce qu'elles ne trouvent pas les compétences, ce qui est dramatique ; de l'autre côté, nous voyons des demandeurs d'emploi et des salariés, jeunes ou moins jeunes, qui n'ont pas accès à la formation et ne peuvent pas saisir les opportunités qui existent. Je le redis, la formation est essentielle.