Intervention de Edouard Philippe

Séance en hémicycle du mardi 26 juin 2018 à 15h00
Questions au gouvernement — Avenir de la nouvelle-calédonie

Edouard Philippe, Premier ministre :

Il y a, à l'évidence – et j'ai déjà eu l'occasion de rappeler, au début de cette séance de questions, que j'étais hier en Chine – , un art de la guerre, mais il y a aussi un art de la paix. Or, l'art de la paix mis en oeuvre par ces trois grandes figures historiques, et poursuivi depuis lors, repose sur une méthode : le dialogue – ininterrompu, exigeant, direct, un dialogue qui accepte l'idée qu'on ne soit pas toujours d'accord, mais qui se fonde sur l'idée que nous ne devons pas en rompre le fil, car si nous le rompions, nous perdrions l'essentiel.

La méthode envisagée par Michel Rocard, Jean-Marie Tjibaou et Jacques Lafleur, et qui a été mise en oeuvre depuis trente ans, est fondamentalement construite sur cette nécessité du dialogue, de petits pas. On dénigre parfois le compromis, mais en vérité, monsieur le député, comme vous le savez parfaitement, c'est parce que chacun sait qu'il détient certes une part de vérité, mais aussi qu'il ne peut construire qu'avec l'autre, que nous avons tout intérêt à faire des compromis, lesquels ne sont pas de petits compromis, de petits abandons, mais la construction commune, en Nouvelle-Calédonie, d'un nouveau modèle de société. Ce qui est en jeu, en effet, au moins autant que les questions liées à l'indépendance ou à la non-indépendance, c'est la question de la construction de la société néo-calédonienne.

Dialogue, donc, et des valeurs communes qui existent, qui sont partagées et qui font que, sur cette île lointaine et magnifique, des hommes et des femmes venus d'horizons radicalement différents et vivant des cultures radicalement différentes veulent vivre ensemble – ce qui est la définition d'un peuple.

Monsieur le député, depuis trente ans, le chemin est un beau chemin. Il n'est pas toujours facile, c'est vrai, mais c'est un beau chemin, un chemin partagé.

Le 4 novembre, les Néo-Calédoniens vont devoir prendre une décision et, à l'évidence, à mesure que nous approcherons de cette date, les tensions, les inquiétudes – les incompréhensions, peut-être – se multiplieront et nous verrons une forme d'angoisse apparaître. Nous le savons. Chacun y est prêt, d'une certaine façon.

Il faut que la question soit posée – elle était prévue dans les accords – et qu'elle soit tranchée, mais il faut aussi que, derrière cette question mécaniquement binaire du « oui » ou du « non », nous ayons tous conscience de l'intérêt de la méthode, des valeurs partagées et, au fond, de cet héritage commun, de cette coutume – ou, plus exactement, de cet usage devenu coutume – du travail en commun, dans le dialogue, avec l'envie de construire la paix.

C'est une très grande responsabilité qui est devant le peuple de Nouvelle-Calédonie, car ce qui est fait aujourd'hui en Nouvelle-Calédonie n'a jamais été fait sur aucun territoire français et n'est pas réalisé ailleurs. C'est quelque chose d'unique, d'admirable. À nous tous, monsieur le député, d'être à la hauteur de nos responsabilités.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Cette législature étant désormais achevée, les commentaires sont désactivés.
Vous pouvez commenter les travaux des nouveaux députés sur le NosDéputés.fr de la législature en cours.