Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, madame la rapporteure, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, la révision constitutionnelle est une occasion rare d'affirmer la place, au sommet de notre hiérarchie des normes, des principes qui fondent notre société. C'est également l'occasion de consacrer solennellement des engagements politiques d'envergure et de faire évoluer notre norme suprême en accord avec la société que nous voulons construire. Je veux bien évidemment parler de l'égalité entre les femmes et les hommes, qui constitue aujourd'hui l'une des pierres angulaires de notre République. En cohérence avec le choix du Président de la République de faire de l'égalité entre les femmes et les hommes la grande cause du quinquennat, la Délégation aux droits des femmes considère que cette révision constitutionnelle doit permettre de mieux affirmer ce principe. Cette évolution correspondrait d'ailleurs à une aspiration forte et largement exprimée depuis plusieurs années par nos citoyens.
Il convient toutefois de procéder à de telles évolutions avec la plus grande prudence et la plus grande rigueur. La Constitution est la norme suprême de notre ordre juridique interne et l'intégration de nouveaux dispositifs, voire de nouveaux droits, doit être appréhendée avec la plus grande vigilance. C'est dans cette double logique que la délégation a choisi de se concentrer sur trois axes principaux, se traduisant par six amendements que je défendrai durant la discussion en commission.
Le principe d'égalité entre les femmes et les hommes n'a pas encore fait l'objet d'une consécration constitutionnelle aboutie : sur cette question, j'ai l'impression que nous restons au milieu du gué. Le temps me paraît venu, mes chers collègues, de relever notre niveau d'exigence en affirmant à l'article 1er de notre Constitution l'égalité devant la loi sans distinction de sexe. Au sein du même article, je pense que nous devons également aller plus loin en termes de parité en passant de la phrase « La loi favorise l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales » à une formulation plus franche et plus forte en affirmant que « La France assure l'égal accès des femmes et des hommes aux mandats électoraux et fonctions électives, ainsi qu'aux responsabilités professionnelles et sociales ». Dès lors que nous renforçons le principe à l'article 1er, il faut en tirer les conséquences dans le reste de la Constitution, notamment aux articles 4 et 8 sur la responsabilité des partis politiques et sur la composition du Gouvernement
Le deuxième axe sur lequel la délégation a choisi de concentrer son attention porte sur la place des femmes en général dans notre Constitution. Nous souffrons encore d'un phénomène d'invisibilisation des femmes, et c'est un travail de longue haleine pour lever tous les obstacles sociaux et symboliques. Cependant, nous pouvons déjà avancer sur cette voie et, pour ce faire, je crois qu'il est temps de privilégier l'expression des « droits humains » dans le préambule de notre Constitution. Cette formulation, qui me semble la plus adaptée, permettra de bien montrer que désormais nous n'oublions plus la moitié de l'humanité lorsque nous parlons des droits humains.
J'en viens au troisième axe que je souhaitais évoquer, la prise en compte des droits des femmes et des enjeux d'égalité dans l'ensemble du processus normatif. Cette question ne se limite pas au projet de loi, mais porte aussi et surtout sur des lois organiques et sur notre règlement. Nous pourrons cependant aborder ces enjeux dans nos débats, notamment pour préciser à l'article 34 que la loi fixe les grands principes de l'égalité entre les femmes et les hommes.
Pour conclure, je voudrais ajouter deux points : d'une part, je suis persuadée que si nous voulons parvenir à l'égalité entre les femmes et les hommes, nous devons aujourd'hui faire changer les mentalités ; d'autre part, l'égalité est par essence une problématique transversale qui doit irriguer toutes nos réflexions et toutes nos législations. Pour ces deux raisons, l'affirmation claire de ce principe de notre Constitution me semble tout à fait pertinente et s'inscrit dans le sens de l'histoire.