Montesquieu a souligné dans De l'esprit des lois que le détenteur du pouvoir a toujours tendance à en abuser et que seul le pouvoir peut limiter le pouvoir : c'est ce que l'on appelle l'équilibre des pouvoirs. À mon avis, et je sais qu'un certain nombre de collègues le pensent aussi, cet équilibre a été rompu par le quinquennat et l'inversion du calendrier électoral. Alors que la réforme de 2008 avait donné davantage de pouvoir au Parlement, ce texte constitue un retour en arrière puisqu'il prévoit au contraire un affaiblissement flagrant, en réduisant le droit d'amendement et les délais accordés au Parlement pour se prononcer.
La réduction du nombre de députés et de sénateurs pose aussi deux difficultés, comme l'a relevé Mme Cécile Untermaier. Nous subirons un décrochage par rapport à d'autres pays, comme l'Allemagne ou l'Italie, qui auront un nombre de députés nettement supérieur au nôtre, et il y aura aussi un problème de lien entre les députés et les territoires. La taille de ces derniers va quasiment doubler, du moins pour les députés qui resteront élus dans ce cadre, pour atteindre parfois 150 kilomètres, et leur population doublera. Pourquoi faut-il maintenir un lien territorial ? Une loi ne peut pas être purement technique : le législateur doit sortir des considérations purement juridiques pour vérifier le texte et l'amender, pour ajuster la loi aux réalités humaines. Pour cela, encore faut-il qu'il y ait une proximité suffisante.
Le package formé par la loi constitutionnelle, la loi organique et la loi ordinaire renforcera le déséquilibre des pouvoirs au profit de l'exécutif. Celui-ci en avait-il besoin ? L'efficacité n'est pas une valeur, mais seulement un moyen : les seules valeurs que je connais sont celles de notre République.