Intervention de Aurélien Pradié

Réunion du mardi 26 juin 2018 à 16h30
Commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la république

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAurélien Pradié :

Puisque nous sommes au stade des généralités, je voudrais en partager quelques-unes.

Au fond, l'excès de mots peut susciter deux soupçons. Il peut être soupçonné de cacher le vide. Je ne pense pas que nous puissions considérer que l'excès de certains mots, récurrents dans la bouche des députés de la majorité, notamment le mot d'efficacité, cache un vide. En l'espèce, il y a de la matière dans cette réforme-là. La deuxième option, c'est que l'excès de mots cache une manoeuvre bien peu avouable du point de vue de la démocratie et du point de vue de l'opinion publique. Je pense que c'est là votre option. Au fond, votre option, c'est – vous le faites depuis un an – de mettre des mots faciles, sur des choses qui jusqu'à présent étaient inquiétantes mais qui, cette fois, sont graves car elles touchent à un patrimoine, le patrimoine commun de ceux qui sont tout et de ceux qui ne sont rien : nos institutions.

Je pense que votre excès de mots méritera, durant tous ces débats, que nous l'analysions avec un peu d'attention. Je ne supporte plus le culte idéologique de l'efficacité : c'est tout à fait insupportable parce que c'est la négation même de ce que nous sommes, chacune et chacun. C'est la négation même de ce qu'est la politique.

Vous prétendez ne porter aucune idéologie… Vous portez une idéologie épouvantable : celle de la seule efficacité ! Il y a quelques mois, alors que nous venions d'arriver à l'Assemblée nationale, nous avions un débat sur le projet de loi pour un État au service d'une société de confiance et la garde des Sceaux prononçait une phrase qui ne me quitte pas depuis le début de nos débats, il y a un an. On l'avait interrogée pour savoir où elle voulait en venir. Elle avait répondu ceci : « Je veux en revenir à la pureté de l'Assemblée nationale. » Il y a là, dans ce texte, cette signature : vous voulez en revenir à la pureté de l'Assemblée nationale. Or la pureté et la démocratie c'est une contradiction, c'est un mélange de deux notions qui n'ont jamais fait bon ménage. L'Assemblée nationale, le Parlement doit rester le lieu des aspérités, le lieu des représentations de notre pays et de notre nation. Ce texte nous permettra de démasquer l'idéologie profonde qui ne vous quitte pas depuis un an.

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