Comme cela a été rappelé, ce débat a déjà eu lieu lors du projet de Constitution européenne en 2005, et la France s'était fortement opposée, par la voix du Président de la République de l'époque, Jacques Chirac, à l'inscription dans cette constitution des racines chrétiennes de l'Europe. La France est une république laïque, ce qui veut dire qu'on doit respecter à la fois la liberté de croire et celle de ne pas croire. Ce principe de laïcité garantit la neutralité de l'État, l'absence de reconnaissance du moindre culte par la République, le respect de toutes les croyances et le libre exercice des cultes. Ce principe est un puissant facteur de vivre-ensemble, et de cette « identité heureuse » à laquelle je veux croire.
Tout à l'heure, Guillaume Larrivé nous mettait en garde contre un nominalisme juridique qui serait en réalité du moralisme. Faites attention à ne pas faire du nominalisme juridique qui serait en fait de l'électoralisme. Je ne suis d'ailleurs pas sûre que les chrétiens eux-mêmes se reconnaissent dans ce type de proposition.
Vouloir affirmer les racines chrétiennes de la France dans la Constitution risque d'exclure tous ceux qui ne sont pas de confession chrétienne ou tous ceux qui ne croiraient pas. Le rôle du législateur, a fortiori lorsqu'il se trouve être constituant, est d'oeuvrer à l'intérêt général et à l'unité de la nation et de se préserver de toute incitation au communautarisme ou au repli sur soi.