Intervention de Jean-Baptiste Lemoyne

Séance en hémicycle du jeudi 5 juillet 2018 à 15h00
Partenariat entre l'union européenne et la nouvelle-zélande — Présentation

Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'état auprès du ministre de l'Europe et des affaires étrangères :

Madame la présidente, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, madame la rapporteure de la commission des affaires étrangères, mesdames, messieurs les députés, nous voici réunis pour examiner le projet de loi autorisant la ratification de l'accord de partenariat sur les relations et la coopération entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande, signé en octobre 2016. Cet accord remplace la déclaration commune de 2007 qui, sans valeur contraignante, reflétait le souhait de disposer d'un cadre juridique pour cette relation, tout en l'étendant à de nouveaux domaines.

Aujourd'hui, treize États membres de l'Union européenne ont ratifié l'accord, dont l'architecture suit assez largement le modèle des accords négociés par l'Union européenne dans la région Asie-Océanie : je pense notamment à l'Australie, avec laquelle un accord comparable a été signé, et qui sera d'ailleurs soumis à votre assemblée dans les tout prochains mois.

Cet accord porte notamment sur quatre éléments clés. Le premier est le respect et la promotion des valeurs qui unissent les Européens et les Néo-Zélandais, en particulier les principes démocratiques, les droits de l'homme, l'État de droit, le développement durable ou encore le respect du droit international. Le deuxième est l'approfondissement de notre coopération sur les enjeux politiques et de sécurité : la lutte contre la prolifération nucléaire constitue une clause essentielle de cet accord, qui fait aussi référence à la justice pénale internationale ou au développement. Troisièmement, il porte sur la coopération technique dans les domaines économique et commercial, s'agissant des questions sanitaires et phytosanitaires – nombre de barrières au commerce prennent cette forme, même si l'on assiste à un cercle vicieux engendré par le retour des droits et tarifs – , des marchés publics ou des droits de propriétés intellectuelle. Quatrièmement, il porte sur les enjeux de justice, de liberté, de sécurité intérieure, de protection consulaire, sans oublier la coopération sectorielle dans la recherche, l'éducation, l'énergie ou les transports.

Un comité mixte se réunira chaque année afin de suivre la mise en oeuvre de cet accord, qui s'inscrit, plus largement, dans une relation bilatérale en plein essor entre la France et la Nouvelle-Zélande : en témoigne la récente visite à Paris de la Première ministre Jacinda Ardern, qui s'est conclue par l'adoption d'une nouvelle déclaration sur les relations bilatérales consacrant notre convergence de vue sur des sujets aussi importants que la défense du multilatéralisme, au moment où celui-ci est gravement mis à mal dans un certain nombre d'instances, la lutte contre le changement climatique et la promotion d'un libre-échange respectueux de l'environnement. Notons, d'ailleurs, que la Nouvelle-Zélande est l'un des seuls pays dans lequel le ministère du commerce est également le ministère de l'environnement. C'est là un précédent intéressant, qui s'inscrit tout à fait dans la volonté française de porter à l'échelle européenne une voix forte en matière environnementale et de développement durable, comme le plan d'action pour la mise en oeuvre de l'accord de libre-échange entre l'Union européenne et le Canada l'a montré.

Par ailleurs, la France est un « pays monde » : comme l'ont montré, il y a quelques jours, les Assises des outre-mer, elle est pleinement un État du Pacifique, et il y a des échanges nourris entre la Nouvelle-Zélande et nos territoires situés dans cette zone. Wellington a ainsi soutenu l'accession de la Nouvelle-Calédonie et de la Polynésie française au Forum des îles du Pacifique, qui vise notamment à améliorer la connectivité dans la région et à développer les échanges humains. Nous sommes donc pleinement membres d'un même écosystème.

Par ailleurs, l'accord contribue clairement au renforcement de l'implication de l'Union européenne dans la zone Asie-Océanie. Il y a un besoin et une envie mutuelle, car, dans cette zone également, on assiste au retour ou à l'affirmation des puissances, qui mettent en danger des principes aussi importants que la liberté de navigation. En réponse aux tests effectués par certaines puissances de cette zone, nous défendons ensemble la liberté de navigation. Nous partageons également des objectifs communs en matière de lutte contre le terrorisme ou de réponses aux catastrophes naturelles. L'intégration croissante de nos deux zones est donc un sujet majeur.

Pour terminer, je souhaite dire un mot sur les négociations en vue d'un accord de libre-échange entre l'Union européenne et la Nouvelle-Zélande, dont je sais qu'elles sont dans toutes les têtes, car un mandat a été adopté. Cet accord revêtira une importance toute particulière dans le contexte que nous connaissons : il illustrera la capacité de l'Europe à répondre à la fermeture des États-Unis, qui se désengagent massivement et créent certaines tensions commerciales, et à défendre, en même temps, une mondialisation ouverte, mais fondée sur des règles. Il s'agit de promouvoir des standards exigeants et contribuant à l'alignement par le haut de certaines normes. Nous avons des sensibilités en matière agricole et environnementale : il convient de les prendre en compte.

D'ailleurs, comme vous le savez – ce point est aussi précisé dans le rapport – , le projet de mandat fait référence, pour la première fois, à la nécessité de prendre en compte, pour chaque filière économique, les concessions accordées dans d'autres négociations. Il s'agit donc d'une première forme d'« enveloppe globale » pour les produits agricoles sensibles, qui permet d'éviter des concessions excessives au regard des capacités d'absorption du marché européen et de l'équilibre économique de nos filières. C'est un vrai pas en avant. Nous serons également attentifs aux effets de bord que ces accords pourraient avoir sur les territoires français du Pacifique.

S'agissant, plus largement, de ces questions commerciales, comme je l'ai dit lors de l'audition organisée par la commission des affaires étrangères, je souhaite que nous rendions un maximum de comptes au Parlement. Je suis disposé à être auditionné non seulement après chaque Conseil sur le commerce, mais aussi avant, afin que la voix portée à Bruxelles tienne compte de la position du Parlement. En outre, je veille à ce que le comité de suivi de la politique commerciale puisse se réunir régulièrement, afin de ne pas donner prise à l'idée que certains sujets seraient mis sous le tapis ou ne seraient pas rendus publics.

S'agissant de la méthode, j'ajoute que ce mandat de négociation ne comprend pas de de volet sur l'investissement : il s'agit d'un accord exclusivement commercial, ce qui implique que seul le Parlement européen s'exprimera. Les parlements nationaux n'auront pas à le faire, ce qui rend d'autant plus important votre association en amont aux discussions.

Telles sont les observations que m'inspirent le présent projet de loi et ses enjeux. J'écouterai avec attention vos remarques sur ce projet de partenariat, lequel s'inscrit dans un projet encore plus ambitieux, qui verra le jour d'ici quelques années.

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