Madame la présidente, monsieur le secrétaire d'État, madame la présidente de la commission des affaires étrangères, madame la rapporteure, mes chers collègues, l'accord que nous examinons aujourd'hui n'est pas un accord commercial, ce n'est pas un accord de libre-échange entre les parties. L'intérêt de la France à ratifier l'accord de partenariat sur les relations et la coopération entre l'Union européenne et ses États membres, d'une part, et la Nouvelle-Zélande, d'autre part, est multiple et doit être perçu au-delà de débats qui sont parfois hors-sujet.
L'histoire entre nos deux pays ne s'inscrit pas seulement dans le rythme des rencontres autour d'un ballon ovale. Elle est longue, riche et parfois difficile, mais elle perdure. La France, en signant cet accord, apportera une pierre supplémentaire à l'édifice de la réconciliation entre nos deux pays, entamée depuis les années 1990, loin de l'implication des services français dans le coulage du Rainbow Warrior en 1985 et, plus généralement, de l'hostilité de la Nouvelle-Zélande face aux essais nucléaires français à Mururoa.
Plusieurs étapes ont permis à nos deux pays de normaliser leurs relations. La restitution par la France, en janvier 2012, de vingt têtes maories au peuple néo-zélandais en est une illustration. La qualité de membres à part entière du Forum des îles du Pacifique obtenue par la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et Wallis-et-Futuna en septembre 2016 en est une autre. Il est d'ailleurs utile de rappeler, comme vous l'avez fait, monsieur le secrétaire d'État, le rôle que la Nouvelle-Zélande a joué pour favoriser l'intégration des territoires français dans cet espace régional. La présence de la France dans cette partie du monde s'en est trouvée renforcée et ces territoires ont gagné en autonomie, aspirant désormais à développer une économie robuste. Cette main tendue de leurs voisins insulaires reconnaît leur rôle politique croissant dans le Pacifique.
Nous devons donc considérer tous ces gestes et l'accord de partenariat qui nous est proposé aujourd'hui comme des signes de la volonté de la Nouvelle-Zélande de renforcer sa relation avec l'Union européenne.
Mes chers collègues, le Pacifique Sud n'est pas un espace isolé du monde où régneraient les moutons et les cocotiers : il est aussi un théâtre des rapports de force et des volontés d'influence des grandes puissances environnantes. Face aux ambitions grandissantes de ces puissances sur le Pacifique et à la fragilité des micro-États, l'Australie et la Nouvelle-Zélande ne veulent pas et ne peuvent pas être les seules garantes de la stabilité du Pacifique Sud. L'Union européenne et la France, en particulier, apparaissent comme un allié majeur, un contrepoids face aux voisins asiatiques, un allié d'autant plus naturel que nous partageons notamment des valeurs communes de démocratie, de protection des libertés, de lutte contre le terrorisme et contre le dérèglement climatique, comme l'a du reste rappelé, lors de sa visite en France en avril dernier, la Première ministre néo-zélandaise, Mme Jacinda Ardern.
C'est bien pourquoi il convient d'apprécier ce texte comme un élément de structuration d'un dialogue politique régulier, permettant de faire face ensemble aux crises et aux défis de demain.
L'Union européenne et la Nouvelle-Zélande partagent ainsi la même préoccupation pour le développement des pays les moins avancés. À l'heure où est engagée l'importante négociation de l'accord de Cotonou entre l'Union européenne et les pays d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique – ACP – , la vision de la Nouvelle-Zélande sera importante pour le maintien d'un équilibre pour les États insulaires du Pacifique.
Le risque est grand d'une dislocation géographique, d'un abandon de la zone Pacifique dans l'accord ACP. Dans ce contexte international, nous ne pouvons pas nous permettre le luxe de les abandonner.
Cet accord nous interroge, nous Européens, davantage sur notre volonté d'être une puissance diplomatique crédible que sur des positions sur les échanges commerciaux. La Nouvelle-Zélande n'est pas un ennemi commercial mais bien plutôt un partenaire sur lequel nous pouvons compter. Ainsi, la France et l'Europe ont tout à gagner d'un dialogue renforcé avec la Nouvelle-Zélande comme avec l'Australie et les États insulaires du Pacifique Sud. Dans notre monde bouleversé, il est des alliances qu'il ne faut pas négliger et des accords qu'il ne faut pas refuser. Mes chers collègues, je vous appelle donc à voter la ratification de cet accord.