C'est donc un consensus assez large, quoique minoritaire, qui s'est formé pour proposer la suppression de l'article 8 du projet de loi constitutionnelle. Cet article permettrait au Gouvernement d'inscrire à l'ordre du jour des assemblées parlementaires certains textes qu'il déclare prioritaires, par dérogation à l'organisation qui réserve aujourd'hui, sur quatre semaines, une semaine à l'initiative parlementaire et une semaine aux travaux de contrôle du Parlement.
Comme le faisait observer tout à l'heure M. Marleix, lorsque, en Conférence des présidents, nous concédons au Gouvernement le droit d'empiéter sur la semaine parlementaire, il s'agit bien d'une concession. Cela signifie que la majorité de l'Assemblée nationale en est d'accord. Ce n'est donc pas un acte de domination, mais un acte de consentement – je tenais déjà à remettre cette pendule à l'heure.
Par ailleurs, l'article 8 reconnaît aux Conférences des présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat un pouvoir d'opposition conjointe. Je précise ce fait qu'il faut prendre en compte si l'on veut considérer l'article 8 dans sa réalité, ce que personne n'a fait jusqu'à présent.
Au fond, cet article procède du souci de remédier à l'encombrement, voire la thrombose, de l'ordre du jour parlementaire. Deux solutions sont possibles : il pourrait s'agir de créer des passerelles entre les différentes semaines de l'ordre du jour, ce que l'on appelle le fast track, affreux anglicisme que je préférerais traduire par « super-priorité », pour rester à peu près français ; on pourrait aussi procéder à une complète remise à plat de l'article 48, ce qui exigerait une concertation approfondie avec le Sénat et le Gouvernement.
Quoi qu'il en soit, le statu quo n'est plus tenable. Je suis donc opposé à ces amendements de suppression. Nous serons cependant conduits, mes collègues rapporteurs et moi-même, à émettre tout à l'heure un avis favorable à l'amendement CL890, qui limite à deux textes par session la possibilité offerte à l'exécutif de recourir à ce droit de priorité élargi.
En somme, nous rejetons les amendements de suppression tout simplement parce que le droit actuel n'est plus tenable et qu'il faut bien trouver une solution au lieu de continuer à faire comme si tout allait bien, mais nous proposerons de limiter la portée de cet article 8 à deux textes par session.
À la faveur de ces précisions, je vous invite, chers collègues, à rejeter les amendements de suppression.