Je ne voudrais pas qu'un membre de notre assemblée ou un citoyen qui regarderait nos débats puisse exciper de nos échanges que quiconque ici tolérerait la négation ou la minoration de génocides. Là n'est pas l'enjeu. l'enjeu est de savoir comment s'équilibre la répression de la minoration ou de la négation de ces crimes à la lumière de la Déclaration universelle des droits de l'Homme et de la jurisprudence du Conseil constitutionnel, autrement dit par rapport à la liberté d'expression. L'objet de la liberté d'expression et la protection de la liberté n'est pas de protéger la négation ou la minoration de la Shoah, mais toutes les expressions qui ne sont pas que des négations scélérates. Il existe un arsenal pénal pour réprimer tous les faits que nous évoquons, vous et moi, et une sorte de chapeau général, si je puis dire, de notre Constitution qui fait primer au fond une forme d'optimisme, c'est-à-dire de protection de la liberté d'expression, tout en assurant par la loi la répression des atteintes aux minorations ou aux négations de génocides.
Lorsque l'on oppose la liberté d'expression et l'horreur que représentent la négation et la minoration de génocides, on pourrait être tenté de vouloir constitutionnaliser telle ou telle dérive – le mot est faible –, telle ou telle pratique condamnable. Mais au fond, on se dit que la République est armée pour sanctionner ceux qui nient les génocides tout en restant porteuse de cet idéal et de cet esprit de liberté d'expression, qu'il faut veiller à ne pas cantonner par une réforme constitutionnelle qui pourrait avoir au final des effets de bord sans commune mesure avec l'origine de ce qui pourrait fonder notre appréciation.