La réponse qui a été apportée tout à l'heure à mon collègue corse met en évidence une contradiction flagrante de notre Constitution. Quelle est la pertinence, quelle est l'utilité du second alinéa du préambule ? Il comporte trois concepts totalement caducs à mes yeux.
Premièrement, il parle de « peuples » et se rapporte aux outre-mer, alors que la révision constitutionnelle de 2003 a banni du texte la notion de peuples d'outre-mer au profit de celle de populations d'outre-mer faisant partie intégrante du peuple français.
Par ailleurs, le concept juridique de « territoires d'outre-mer » est totalement dépassé : sa présence dans le préambule remonte à la période où la France accompagnait le processus de décolonisation et d'indépendance des territoires dits d'outre-mer, qui étaient disséminés aux quatre coins du monde. À ma connaissance, cette mention est la seule occurrence de l'expression dans la Constitution : dans le reste du texte, on parle de « collectivités d'outre-mer », ou simplement de « collectivités ».
Enfin, dans l'hypothèse où cet alinéa concernerait bien les populations et collectivités d'outre-mer, sa rédaction laisse penser qu'après soixante-douze ans de départementalisation et d'identité ou de spécialité législative, ces populations et collectivités n'auraient toujours pas atteint le même niveau d'évolution démocratique que la France continentale. Avouez-le, une telle affirmation pourrait faire l'effet d'une bombe dans nos régions ultramarines.
Aussi faudrait-il changer de point de vue sur cet alinéa, et faire en sorte que la représentation nationale comprenne différemment ce que sont les territoires et populations d'outre-mer et les réalités juridiques qui les organisent. Nous avons tous compris, je crois, comment les choses fonctionnent ; je ne m'interrogerai pas plus longtemps.
Je propose la suppression de cet alinéa dont la caducité n'est plus à démontrer, sans quoi nous laisserions croire qu'il existe deux Républiques et deux démocraties, celle de la France continentale et celle des territoires d'outre-mer. J'insiste vraiment sur la nécessité d'étudier dès à présent ce sujet sans tabou : il risque de réapparaître dans la suite de nos discussions sur la présente révision constitutionnelle.