Les conséquences en sont connues : recours à toujours plus de contractuels dans la fonction publique, au risque d'une précarisation croissante ; nouvelle coupe dans l'APL, l'aide personnalisée au logement – alors même que le mal-logement ronge la vie de nombreuses personnes ; coupes dans les aides sociales, lesquelles – sous couvert de « simplification » – seront réduites.
À ce propos, sachez, messieurs les ministres, qu'une majorité de nos concitoyens – près de 60 % selon Elabe – estiment que ces aides sont justes, et que plus du quart des Français pensent même qu'elles sont très clairement insuffisantes. Quant aux aides relatives à la vieillesse et à la retraite, le consensus est écrasant : plus de 80 % des Français les jugent insuffisantes, ce qui démontre bien nos défaillances sur ce point, s'agissant de la solidarité nationale.
Avant d'entrer dans le vif du sujet, je me permettrai de relever le flou qui entoure ces annonces, ainsi que les louvoiements incessants de la communication gouvernementale, relevés jusqu'au sein même de la commission des finances, et tout à l'heure encore par Éric Woerth. Pour un débat d'orientation, je trouve que nous marchons en plein brouillard ! En effet, le Gouvernement se réserve un obscur privilège, celui de dévoiler ses réformes – pardon, ses « transformations de l'action publique », selon le vocable en vigueur – « au fur et à mesure », suivant sa « disponibilité » et sa « volonté », pour reprendre les termes de M. le Premier ministre.
Nous sommes suspendus à la moindre annonce ministérielle, avant qu'un démenti ne nous plonge à nouveau dans l'expectative. Cette façon de procéder empêche la tenue d'un débat franc et ouvert sur la politique économique que le Gouvernement entend mener, notamment en matière de réduction des dépenses publiques, puisque tel est bien l'axe de travail retenu.
Cette opacité, qui entrave et amoindrit le débat parlementaire – ce à quoi nous sommes habitués – , nous pénalise tous, ceux qui souscrivent à l'objectif du Gouvernement mais doutent de la faisabilité du budget en raison de mesures telles que la suppression de la taxe d'habitation ou de la dégradation de la conjoncture économique, comme ceux qui en contestent la logique et entendent démontrer les conséquences concrètes de cette politique sur l'économie du pays.
Toutefois, si les détails de celle-ci restent obscurs, je reconnais à ce gouvernement une certaine constance dans sa démarche, consistant à suivre docilement les injonctions de la Commission européenne, avec pour boussole la sacro-sainte règle d'un déficit inférieur à 3 % du PIB.
Je ne reviendrai pas sur le caractère arbitraire de ce chiffre. Je ne développerai pas non plus la subordination qui en résulte s'agissant de la fixation de notre budget – prérogative essentielle de l'État – à une instance extérieure et non démocratique. Je ferai en revanche observer à M. Joël Giraud, qui indiquait hier que notre débat doit être replacé dans le contexte de l'engagement européen de la France, que celui-ci n'est pas celui des Français, à tout le moins depuis le rejet, en 2005, du traité visant à établir une constitution européenne, qui procédait de ce néolibéralisme délétère.
Ce qui m'intéresse ici, c'est la signification de cette cage de fer budgétaire pour la vie de la nation. Selon votre logique, messieurs les ministres, l'équilibre budgétaire ne passe pas par la remise en cause de la baisse des cotisations patronales, la lutte effective contre l'évasion fiscale ou la suppression des cadeaux fiscaux de toutes sortes offerts aux puissants, qui grèvent les recettes de l'État. Non, pour le gouvernement dont vous êtes membres, l'équilibre budgétaire passe obligatoirement par la réduction de la dépense publique, …