Le rapporteur général l'a d'ailleurs fort bien souligné. Néanmoins, nous avons quand même pu y déceler quelques-unes de vos intentions.
Tout d'abord, ces premiers éléments confirment et amplifient les coupes budgétaires que vous avez engagées dès l'été 2017. Je prendrai deux exemples.
Le premier concerne l'emploi. À l'été 2017, vous avez coupé un milliard d'euros sur le budget du ministère du travail. Dans le budget de 2018, vous avez encore coupé 1,5 milliard sur le budget de ce ministère. Pour 2019, vous proposez de l'amputer de nouveau de 2 milliards. En clair, en procédant ainsi, monsieur le ministre, vous donnez le coup de grâce aux emplois aidés. En 2016, nous avions créé 465 000 emplois aidés, ce qui correspond à peu près au niveau atteint par les précédents gouvernements, pour un coût total de 3,3 milliards d'euros. Or, si l'on additionne toutes vos coupes, on se rend compte qu'il n'y a plus d'argent pour des créations d'emplois aidés. Sur ce point, monsieur le ministre, il faudra que le Gouvernement précise ses intentions, mais je le répète, la règle de trois très simple que je viens de faire montre qu'il n'y aurait plus d'argent pour les emplois aidés en 2019.
Je sais que cela correspond à votre idéologie. Vous voyez la France comme une communauté de startupers qui partent tous à l'aventure, mais notre pays n'est pas cela. La France est composée non seulement de startupers, mais aussi de personnes qui méritent d'être accompagnées dans l'emploi – je crois que les emplois aidés, aussi imparfaits qu'ils soient, y contribuaient. Aujourd'hui, la seule chance que vous donnez à ces personnes, c'est la case Pôle emploi.
Mon deuxième exemple porte sur le logement et la cohésion des territoires. Là aussi, à l'été 2017, vous avez baissé les aides personnalisées au logement – APL – de 5 euros par bénéficiaire et par mois, ce qui a représenté une coupe budgétaire de 80 millions d'euros. Dans le budget de 2018, vous avez de nouveau coupé dans le budget du logement. Et maintenant, pour 2019, vous proposez une baisse budgétaire de 1,16 milliard d'euros. Là encore, faisons une petite règle de trois. Vous donnez un nouveau coup de rabot aux APL. Après une baisse de 5 euros en 2017 et une autre baisse de 5 euros en 2018, du fait de la non-revalorisation des aides en fonction de l'inflation, votre proposition conduit à une nouvelle baisse de 5 euros en 2019. En moyenne, les APL auront donc diminué en moyenne de 15 euros par mois pour les 6,5 millions de bénéficiaires. C'est, tout simplement, du jamais vu !
Les premières perspectives budgétaires pour 2019 sont donc une redite de ce que vous avez engagé. Oui, vous ponctionnez celles et ceux qui ont le moins. Oui, au nom de votre idéologie de la libération, vous baissez l'impôt de celles et ceux qui ont le plus, puisque vous annoncez la suppression de la taxe d'habitation pour les 20 % de Français les plus aisés. Agir ainsi est non seulement injuste, mais surtout, cela ne fait pas une politique économique pour la France. Quoi que vous en disiez, vous êtes rattrapés par la réalité. Vous tabliez sur une croissance de 2 % en 2018 : elle devrait tourner autour de 1,7 %. En faisant un petit calcul de coin de table, nous en déduisons une baisse de recettes de 4 milliards d'euros dans les caisses de l'État, sans compter la diminution de recettes liée aux suppressions d'impôts – ISF et autres – que vous avez engagées.
Quoi que vous en disiez, cette réalité ne vous a pas échappé puisque, moins de six mois après le vote de la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, vous en dégradez la trajectoire dans ce rapport sur l'évolution de l'économie nationale et sur les orientations des finances publiques. La trajectoire que vous nous présentez aujourd'hui pour les années 2018 à 2022 n'est pas celle que votre majorité a votée il y a six mois.