Je voudrais qu'il soit entendu au moins une fois qu'il y a ici des adversaires de la session unique permanente. Cette trouvaille est venue après qu'on a constaté qu'il y avait thrombose du travail parlementaire, que l'on siégeait la nuit et parfois le week-end, et qu'on était obligé de faire des sessions extraordinaires pour rattraper les retards. Alors on a trouvé la solution qui allait tout arranger, tout régler : la session unique. Résultat : nous avons une session unique, on se réunit le samedi et le dimanche, la nuit et le jour, et cela continue pire qu'avant. C'est une véritable incitation, quel que soit le Gouvernement, à augmenter le nombre de textes de loi qu'on dépose, sans qu'aucun de nous ne conteste le fait de traiter autant de textes de loi, souvent si longs et si bavards. C'est une mauvaise idée !
Vous voulez consacrer cet emploi du temps en disant : « Puisque c'est comme ça, autant le mettre dans le texte ! » Non, puisque c'est comme ça, autant prendre d'autres dispositions et garantir qu'il y ait des sessions à l'intérieur desquelles on organise le travail et son rythme. Sans vouloir aller trop loin, je vous dirai que qui est maître des rythmes est maître du pouvoir ; or nous ne le sommes d'aucune manière. J'ajoute qu'il y a autre chose dont personne ne tient compte : nous avons besoin d'être au contact de nos électeurs. Notre tradition est celle du tribun du peuple et il ne saurait être question de transformer le travail du député en une fonction qui nous garderait enfermés dans un palais, nuit et jour, pendant des jours et des jours. Nous avons besoin d'aller au contact de nos électeurs !
Enfin, nous avons besoin de travailler personnellement. Quand nous sommes ici, nous siégeons en commission, nous tenons des réunions, nous présentons des textes, nous en consultons d'autres. Quand avons-nous le temps de lire et de nous aérer l'esprit pour lui redonner de la souplesse ? Aujourd'hui, tout le monde se rend compte qu'il y a quelque chose d'extraplanétaire dans notre situation : nous sommes en plein mois de juillet, nous sommes constituants, mais tout le monde s'en fout, personne n'est au courant de ce qu'on est en train de faire ! C'est le symptôme suprême du fait que ce n'est plus vraiment une assemblée législative, mais une sorte de rouage aveugle qui mouline des textes sans aucun rapport avec l'état d'esprit de la population. Je suis sûr qu'on sera tous d'accord là-dessus ; donc à bas la session unique !