Sur les perturbateurs endocriniens, monsieur Ludovic Pajot, je ne partage pas du tout votre analyse. Nous nous trouvions dans une situation complètement bloquée, tout simplement parce qu'il n'y avait pas de définition générale des perturbateurs endocriniens. Or nous en avions besoin pour surveiller ces substances et éliminer progressivement les plus dangereuses. Grâce à la France, nous avons réussi à avancer et nous sommes désormais en mesure de mieux connaître ces substances et d'exclure les plus dangereuses.
Sur la compatibilité entre les éoliennes offshore et la biodiversité – mais la question vaut également pour les éoliennes terrestres évoquées tout à l'heure –, ma réponse est que les unes ne doivent pas se faire au détriment de l'autre. Ces équations sont évidemment difficiles. Il est important de prendre des précautions, mais regardons ce qui s'est fait à l'étranger, puisque nous n'avons encore implanté en France aucun mât d'éolienne offshore.
Je note au passage que si j'avais tenu compte des préconisations des uns et des autres, j'aurais remis à plat les six projets offshore, parce qu'ils n'ont pas forcément été établis dans les règles de l'art. Mais leur réalisation en aurait été retardée de dix ou douze ans et les scénarios de la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) en auraient été fortement limités. Il faudra en tirer des enseignements pour les prochains, parce que je me demande parfois comment le zonage a pu être fait. Si, dans certaines zones, les éoliennes avaient été placées un peu plus à l'ouest, elles n'auraient pas été sur des zones de pêche ; dans d'autres, on aurait pu éviter de mordre sur des parcs nationaux, etc.
L'idée que les éoliennes soient incompatibles avec le cahier des charges d'un parc marin mérite d'être débattue. Pour moi, ce n'est pas forcément inconciliable. Quand on regarde ce qui s'est passé à l'étranger, les impacts sur les ressources halieutiques et sur la biodiversité n'ont pas été établis, pour l'instant, de manière probante. Je ne veux pas sacrifier l'une aux autres, mais nous avons dû faire certains choix pour lancer la filière.
Les opérateurs concernés ont vraiment revu à la hausse leur cahier des charges sur l'étape de l'installation. Car il y a deux impacts : celui des travaux d'installation, et celui, à long terme, de l'activité des éoliennes. Je pense que nous avons fait le maximum. Je ne veux sous-estimer ni surestimer l'un ni l'autre, je ne dis pas qu'ils seront neutres, bien entendu, mais nous avons des équations à résoudre, et la biodiversité est affectée aussi par l'usage des énergies fossiles. Nous allons d'ailleurs fermer quatre ou cinq centrales à charbon, dont l'effet sur la santé et sur la biodiversité n'est pas neutre non plus. Des choix devaient être faits. Ce n'est pas à vous que j'apprendrai que notre fonction nous y oblige, quitte parfois à opter pour les moins mauvais choix.
Quant à l'agriculture, l'alignement des planètes a rarement été aussi favorable à une transformation profonde de nos modèles agricole et alimentaire.
Il y a d'abord un marché, du fait d'une forte demande sociétale de produits de qualité et de proximité qui n'est pas couverte, même par la croissance impressionnante des coopératives bio. Leur situation a un peu changé parce que la grande distribution a pris quelques parts de marché, mais leur croissance atteignait récemment encore 30 %, et doit être aujourd'hui de 16 % ou 17 %. Outre le bio, tout un ensemble de pratiques agro-écologiques vient renforcer ce premier facteur favorable.
Deuxièmement, si nous voulons une agriculture qui contribue à la lutte contre le changement climatique, nous devons cesser de nourrir notre bétail de protéines végétales produites au détriment de la forêt amazonienne. Il nous faut donc un plan de production de protéines végétales beaucoup plus ambitieux que celui dont nous disposons aujourd'hui.
Vous connaissez, troisièmement, l'objectif, fixé lors des États généraux de l'alimentation (EGA), de 50 % de repas de qualité et de proximité dans la restauration collective, avec au moins 20 % d'aliments issus de l'agriculture biologique. J'ai tendance à penser que ce sera un levier très structurant, et que nous pourrons probablement aller beaucoup plus vite et beaucoup plus loin.
Comme je le disais tout à l'heure, la transition énergétique, la lutte contre le changement climatique et la lutte contre l'érosion de la biodiversité vont de pair. Si nous faisons en sorte que les agriculteurs en deviennent des acteurs et diversifient ainsi leurs revenus, cela contribuera encore à un contexte propice à cette mutation. Les jeunes agriculteurs sont demandeurs, à partir du moment où on les aide. Nous allons donc mettre en place les services environnementaux. Mais l'important sera de nous concerter pour utiliser au mieux ce levier très puissant de la politique agricole commune. Nous avons vraiment les moyens d'accélérer cette transition et de la mettre au service de l'intérêt général.
Sur les accords commerciaux, monsieur Jean-Yves Bony, j'ai suffisamment dénoncé l'incohérence qui existe entre certains d'entre eux – dont le plus actuel, en particulier – et les engagements climatiques de la conférence de Paris. Vous avez raison d'attirer l'attention sur ce point essentiel. Car rien ne nous est épargné, et nos acteurs économiques et nos agriculteurs se voient imposer des distorsions de concurrence. Nous devrons donc être très vigilants. J'espère que les choses seront plus faciles pour les traités à venir que pour ceux dont la ratification est en cours. Je pense notamment au Comprehensive Economic and Trade Agreement (CETA) avec le Canada, sur lequel, toutefois, je rappelle que le Parlement aura le dernier mot.
Je souhaite en tout cas, comme je l'ai dit à plusieurs reprises, que l'accord de Paris devienne une clause essentielle des traités commerciaux à venir. Quant à la mise en oeuvre du CETA, nous verrons, en fonction des préconisations du rapport remis récemment, s'il peut être considéré comme compatible avec nos engagements sur le climat.
Vous évoquiez, monsieur Loïc Dombreval, les contrats de transition écologique. Nous devons, bien entendu, avoir des contrats semblables dans le domaine de la biodiversité. L'urgence sociale nous a conduits à les mettre d'abord au service de la transition énergétique, mais plusieurs sont actuellement à l'étude dans le domaine de la biodiversité.
Sur la pyrale du buis, honnêtement, je vais vous dire une banalité : je pense qu'elle fait partie des espèces sur lesquelles nous travaillons actuellement, mais je vous répondrai de manière plus détaillée par la suite.