Intervention de Nicolas Hulot

Réunion du mardi 10 juillet 2018 à 16h30
Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire

Nicolas Hulot, ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire :

Sur les agences de l'eau, les discussions avec nos amis de Bercy sont éprouvantes. Nous essayons d'obtenir, dans un premier temps, l'établissement d'un plafond pluriannuel. Pour répondre à vos inquiétudes, j'ai repris l'argument que m'avaient présenté les responsables de bassins et les agences : ils ont pris des engagements, et ne sont plus en mesure de les tenir. J'espère qu'en persévérant dans cette voie, nous aurons gain de cause. L'autre piste importante sur laquelle nous travaillons est la péréquation. Car les situations, d'un bassin à l'autre, ne sont pas les mêmes, et nous devons inciter à la solidarité. Mais il faut travailler avec toutes les instances des bassins, chacun défendant son pré carré, et faire valoir le critère objectif des différences de situations.

Je retiens votre proposition, madame Sophie Auconie. L'eau n'est pas le seul domaine où nous sous-utilisons les financements européens, alors qu'ils représentent des possibilités considérables. Je vous propose de vous recevoir pour déterminer la meilleure manière de procéder.

Quant à la législation européenne sur les dispositifs d'aide publique aux entreprises agricoles, vous savez qu'en matière d'aides agro-environnementales, il existe des règles qui peuvent paraître limitatives, comme celles relatives au financement des changements de pratiques, qui ne peut excéder les seuls coûts et manques à gagner pour les agriculteurs. Mais des marges de manoeuvre existent si l'on veut relever le défi de l'amélioration de la qualité de l'eau.

En outre, des discussions sont actuellement en cours, au niveau européen et au niveau national, pour la mise en oeuvre d'une PAC rénovée après 2020. J'espère qu'elles nous laisseront la liberté d'apporter des aides aux exploitations compatibles avec les objectifs qui nous réunissent aujourd'hui : la préservation de la biodiversité et la protection des ressources en eau.

Pour en revenir au financement des équipements pour le petit cycle et à celui des travaux pour le grand cycle, les équipements pour l'eau et son assainissement peuvent effectivement, comme le disait Mme Sophie Auconie, bénéficier d'aides européennes, notamment outre-mer. Ces fonds y sont d'ores et déjà mobilisés dans le cadre du plan « eau et assainissement ». En métropole, en revanche, la Commission européenne n'a pas admis que le Fonds européen de développement régional (FEDER) puisse, sur la période actuelle, financer ces équipements. Puisque vous nous dites le contraire, madame, nous devrons tirer cela au clair.

Pour la prochaine programmation, les contraintes budgétaires conduisent à faire des choix difficiles. La première phase des Assises de l'eau a montré que l'essentiel du financement des infrastructures devrait provenir de la facture d'eau. Nous serons en tout cas obligés de définir – comme je l'ai fait – des priorités pour les agences de l'eau. Nous devrons ralentir la réalisation de certains projets et nous concentrer sur des territoires prioritaires, notamment en matière d'assainissement. Il est donc important de piloter l'action publique en fonction de ce qui a déjà été fait, de manière plus ou moins satisfaisante.

Comment aider les petites îles à s'approvisionner en eau ? Je pense qu'il faut développer des solutions sur mesure, qui allient économies, recyclage et innovation. Dans ce cas précis, les agences de l'eau peuvent fournir un accompagnement financier. Elles le font déjà pour l'intervention et l'investissement, mais apportent également une aide très importante en matière d'ingénierie et d'études.

Pour répondre à M. Martial Saddier sur les budgets qui semblent opposer eau et biodiversité, il est normal que l'on fasse évoluer les priorités au fil du temps. Il ne faut pas les opposer, encore une fois, mais les piloter. Je souhaite, c'est vrai, que nous nous recentrions sur le grand cycle, puisque beaucoup de choses ont déjà été faites pour le petit. J'attends donc beaucoup de la deuxième phase des Assises de l'eau.

Je suis en tout cas favorable, comme je viens de le dire, à ce que l'on travaille sur la péréquation. J'ai le sentiment que les esprits y sont ouverts.

Pour répondre à M. Hubert Wulfranc sur les concessions hydroélectriques et la Commission européenne, c'est un dossier auquel nous avons déjà consacré un temps considérable, c'est le moins que l'on puisse dire, entre les visites de la Commissaire et nos voyages à Bruxelles. La Commission examine nos propositions, et nous essayons de la convaincre, en faisant valoir la solidité de notre dossier. Dans ces discussions, qui durent depuis plus de dix ans, nous défendons une position très ferme, mais la décision finale appartient aux instances communautaires. La Commission n'a pas rejeté nos propositions, et les discussions vont encore se poursuivre un certain temps. Tous les espoirs sont donc encore permis.

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