Avant que nous ne passions à l'échange automatique de renseignements, en 2014, et avant même les Swiss Leaks – qui nous ont bien aidés car cela a entraîné une réaction politique des autorités suisses –, une négociation avait été engagée. Conscients qu'après l'échange d'informations fiscales à la demande, déjà sur les rails, l'étape suivante serait l'échange automatique de renseignements dont, pour des raisons évidentes, ils ne voulaient pas, les Suisses avaient conçu le « projet Rubik » – une dénomination qui a fortement déplu à l'inventeur du Rubik's cube. La Suisse proposait aux pays européens de conclure des accords bilatéraux prévoyant qu'elle prélèverait l'impôt dû par leurs contribuables respectifs sur leurs dépôts dans la Confédération à un taux fixé par le pays d'origine, auquel elle le reverserait en bloc ; en contrepartie, le pays signataire de l'accord s'engagerait à ne plus demander à la Suisse de renseignements en matière fiscale. En Allemagne, comme l'a rappelé M. de Courson, le Bundestag s'était prononcé en faveur d'un tel dispositif mais le Bundesrat l'a refusé. Après avoir hésité, la France n'a finalement pas signé d'accord de ce type, contrairement au Royaume-Uni, qui a de ce fait récupéré 500 millions de livres sterling.
L'OCDE ne favorisait pas ces négociations. J'avais suivi le secrétaire d'État suisse alors qu'il parcourait l'Europe pour « vendre » le « projet Rubik », et je lui disais qu'il serait infiniment préférable d'en venir à l'échange automatique de renseignements. Finalement, le projet suisse a échoué, on est effectivement passé à cet échange automatique et la Suisse l'applique sans ambiguïté.