Comme nous tous, vous connaissez les GAFA –Google, Apple, Facebook et Amazon, pour ne citer que celles-là. Autant de noms que connaissent également plus d'une PME française et qui parfois les agacent, pour dire les choses de manière mesurée. « Rien n'est plus agaçant que le bonheur des autres » disait l'écrivain – surtout quand il sert de jauge à votre propre déconfiture. Un agacement qui ne porte évidemment pas sur les critères de réussite mais sur des disparités de traitement fiscal qui nous nuisent intrinsèquement.
Après que plusieurs affaires ont défrayé la chronique ces dernières années, telle celle des Panama Papers, le grand sujet des disparités fiscales entre les États membres de l'Union européenne repart avec force. Qu'il s'agisse des différences notoires de taux d'imposition sur les sociétés, des différences d'assiette – question à l'étude dans le cadre du projet ACCIS – ou des difficultés que nous éprouvons pour taxer certaines entreprises, notamment celles du numérique, sur notre sol.
Ces sujets ne sont pas nouveaux, tant s'en faut, puisqu'en 2009 déjà M. Nicolas Sarkozy s'était proclamé défenseur de l'intérêt commun et de l'abrogation du secret bancaire et des paradis fiscaux qui le pratiquent. Huit ans plus tard, même si beaucoup a été fait, nous sommes très loin de l'homogénéité fiscale européenne. C'est très probablement l'une des raisons pour lesquelles vous avez reçu mandat d'avancer d'ici à avril 2018 des propositions visant à refondre les règles fiscales internationales.
Intervenant en ma qualité de rapporteur spécial pour les affaires européennes et en tant que député d'une circonscription jouxtant le Luxembourg, il m'importe de rappeler que de nouvelles méthodes de taxation des GAFA sont à l'étude. Mais, il y a quelques mois, le Conseil constitutionnel a censuré l'article 78 de la loi de finances pour 2017, qui prévoyait de faire cesser le contournement par les multinationales de la taxation de leurs bénéfices par l'administration fiscale française en étendant le champ d'application de l'impôt sur les sociétés aux bénéfices réalisés en France par des personnes morales établies hors de France. Le Conseil ayant jugé la « taxe Google » inconstitutionnelle au motif que l'administration fiscale ne peut « choisir les contribuables qui doivent ou non entrer dans le champ d'application de l'impôt sur les sociétés », ne peut-on craindre qu'il censure une nouvelle fois une tentative similaire ?