Nous nous retrouvons pour un cycle d'auditions que Brigitte Bourguignon, présidente de la commission des affaires sociales, et moi-même pour la commission des lois, avons souhaité organiser conjointement afin d'amorcer le débat sur la prochaine révision des lois relatives à l'éthique de la médecine, à la recherche médicale, la bioéthique. Nous poursuivons ainsi un débat ouvert il y a plus de vingt ans avec les premières lois de bioéthique de 1994. La dernière actualisation de ces lois en 2011 prévoyait que le Parlement les examine de nouveau en 2018. Le processus de révision a été lancé, le 18 janvier dernier, par le Comité consultatif national d'éthique, avec des États généraux de la bioéthique, qui se sont achevés le 9 mai. Une synthèse des travaux sera remise à l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques (OPECST), que nous allons associer à notre réflexion, et à madame la ministre des solidarités et de la santé, au début du mois de juin. Le Conseil d'État devrait également remettre un rapport sur le sujet d'ici la fin du mois de juin. Dans ce cadre, le Gouvernement présentera un projet de loi à l'automne.
La bioéthique touche à des sujets complexes, sensibles, qui concernent tous les Français. L'évolution rapide des sciences et technologies médicales est source de progrès, autant que d'inquiétudes. C'est la raison pour laquelle, avec Brigitte Bourguignon, nous avons souhaité que nos commissions s'en saisissent plusieurs mois avant la présentation du projet de loi, afin de prendre ensemble le temps de la réflexion et de mener un travail de fond grâce à ce cycle d'auditions.
Cette première audition est consacrée au cadre juridique dans lequel s'inscrivent la bioéthique et les enjeux liés à la recherche sur le génome et sur l'embryon. Par la suite, nous aborderons les neurosciences et l'intelligence artificielle, avant d'aborder le thème « procréation et société ».
Pour cette première table ronde intitulée « De la bioéthique au droit de la bioéthique », nous accueillons M. Bertrand Mathieu, professeur de droit public à l'Université Panthéon Sorbonne Paris I et M. Jean-René Binet, professeur de droit privé à l'Université de Rennes 1.
Cette approche juridique s'impose, car la réflexion à laquelle nous invite la bioéthique dépasse le seul champ de la science. Les découvertes scientifiques peuvent, par leurs usages, remodeler en profondeur notre société, voire la définition de l'individu. La bioéthique invite à réfléchir au progrès, mais également aux dérives que peuvent engendrer la recherche et ses applications. Il s'agit, pour la loi, d'encadrer des progrès raisonnables et raisonnés.
Avant de donner la parole à M. Mathieu et à M. Binet pour nous retracer l'évolution du cadre juridique depuis les lois fondatrices de 1994 et nous indiquer quelles sont, à leurs yeux, les pistes d'évolution possibles, en particulier s'agissant de la recherche biomédicale, de l'assistance biomédicale à la procréation, des neurosciences et de l'intelligence artificielle, notre collègue Xavier Breton a demandé la parole.