Intervention de Muriel Pénicaud

Réunion du mardi 4 juillet 2017 à 21h00
Commission des affaires sociales

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

Pour se faire confiance, madame Fiat, il faut être deux. Le droit de veto unilatéral n'a pas de sens ; le dialogue social, si.

Quant à la limitation du nombre de CDD par entreprise, le Gouvernement – et c'est sans doute aussi le souhait des députés qui, tous les jours, sont au contact de nos concitoyens – est attaché à prendre des mesures adaptées aux réalités. En limitant à 10 % le nombre de CDD par entreprise, nous tuerions la quasi-totalité du secteur culturel français, par exemple, où ces contrats sont majoritaires – ce que l'on peut regretter ou non. Compte tenu de la manière dont se font les projets et les financements dans ce secteur, ce serait une catastrophe. Cet exemple suffit à démontrer que nous devons être pragmatiques.

Le CDI reste autant que possible la norme et le but, et tout ce que nous pouvons faire, les uns et les autres, pour lutter contre la précarité et favoriser le long terme est utile. Pour ce faire, il faut accepter de la souplesse – c'est le paradoxe. C'est ainsi que nous pourrons créer la possibilité de véritables contreparties permettant de multiplier les CDI. Ce n'est pas en décrétant des mesures « hors sol », éloignées de la réalité des entreprises et des marchés, que nous y parviendrons.

La médecine du travail, madame Firmin Le Bodo, est un sujet que nous devons traiter – un amendement le concernant me permettra d'y revenir plus en détail demain – car les problèmes que vous avez soulevés sont tout à fait réels.

Puisque nous avons abordé l'ensemble des sujets avec les organisations représentatives, monsieur Serville, le temps est en effet venu de consulter les autres organisations, notamment celles d'outre-mer, et nous allons explorer selon quelles modalités nous pourrons les rencontrer afin d'examiner ce qui doit être adapté, le cas échéant.

J'ai cité, madame Dubié, les secteurs de la construction navale et de l'informatique, où les logiques de marché reposent sur de grands chantiers. Il arrive que les CDI se prolongent au-delà d'un seul et même chantier – et c'est précisément pour conserver les compétences dont elles disposent que les entreprises concernées signent des CDI de chantier, même s'il arrive que ce ne soit pas possible faute de nouveau chantier. Aujourd'hui, le CDI de chantier protège mieux que la situation qui prévaut dans certaines branches, où les contrats d'intérim et les CDD se multiplient, au détriment de la sécurité de l'emploi et parfois de la sécurité tout court, sur un même chantier – pour un même salarié ou non. L'encadrement par la loi et la définition par accord de branche permettront d'éviter les dérives, et cette double précaution contribuera davantage à la lutte contre la précarité que l'inverse.

S'agissant de l'Europe sociale, deux rendez-vous importants se profilent à l'automne. Le premier a trait à la directive sur les travailleurs détachés ; je l'ai évoquée. Le second sera le grand rendez-vous social de l'Europe en novembre, à Göteborg, à l'occasion duquel nous formulerons avec d'autres pays plusieurs propositions car si la France doit protéger, l'Europe doit protéger aussi, et plus elle le fera, plus ses membres, y compris les grands pays comme le nôtre, seront forts face à la compétition mondiale, pour le bénéfice des salariés comme des entreprises. La feuille de route sera longue, car à vingt-sept le processus est lent ; mais quelle puissance ! Lorsque les Vingt-Sept et leurs 500 millions de citoyens prennent position, cela fait une grande différence non seulement pour les Européens, mais aussi dans le monde.

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