Intervention de Boris Vallaud

Séance en hémicycle du mercredi 25 juillet 2018 à 15h00
Liberté de choisir son avenir professionnel — Explications de vote

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaBoris Vallaud :

Je dis d'abord un mot sur la méthode, même si d'autres l'ont déjà fait : sur ce texte, il y a eu beaucoup d'impréparation, beaucoup de tergiversations et beaucoup d'amendements du Gouvernement ; en revanche, peu d'amendements de l'opposition ont été adoptés. Sans nous en accommoder, nous finissons par nous y habituer.

C'était un projet de loi très prometteur, mais il aboutit finalement à peu de choses, qui nous inquiètent néanmoins. Ce projet de loi déçoit et inquiète, d'abord parce qu'il poursuit une logique d'individualisation des droits à outrance et nous met sur le chemin d'un workfare dur, à travers la prétendue universalisation de l'assurance chômage.

C'est une loi qui, très largement, libérera les marchés plus qu'elle ne libérera les individus, malgré vos proclamations. Vous préférez ébranler l'existant, parce que vous avez le goût de la réforme pour la réforme, plutôt que de chercher à améliorer les dispositifs.

Au fond, c'est d'abord une loi qui menace l'apprentissage, en dépit des bons chiffres que j'ai évoqués tout à l'heure. L'apprentissage était un service d'intérêt général non économique, qui relevait de la formation initiale ; il devient un marché concurrentiel. Vous libéralisez l'ouverture des CFA ; le changement des règles de financement menacera de nombreux petits CFA et conduira probablement à leur fermeture. Les territoires ruraux s'en inquiètent vivement.

En outre, vous avez fait le choix, commis l'imprudence ou fait le pari un peu fou de confier l'apprentissage aux 600 branches, alors qu'une dizaine d'entre elles seulement sont constituées. Vous risquez en réalité d'obtenir de bien mauvais chiffres, là où vous en espérez de bons.

La seconde inquiétude porte sur les droits à la formation. Il nous paraît qu'il y aura moins de droits à la formation effectifs après votre réforme qu'il n'y en a aujourd'hui. Le coût moyen d'une formation étant de l'ordre de 37,80 euros, la conversion du CPF en euros aboutira, de fait, à faire passer les droits à formation de vingt-quatre à treize heures par an. Prenons l'exemple d'un simple bilan de compétences : aujourd'hui, on peut le financer en une année, avec vingt-quatre heures ; demain, il y faudra trois ans, sachant qu'un tel bilan coûte environ 1 500 euros.

Vous avez crié haro sur le compte individuel de formation, créé dans les années 1970, qui était pourtant un succès. Vous avez décidé de le transformer en CPF de transition, en lui consacrant 400 millions d'euros, contre 800 millions actuellement. Vous avez réduit les droits renforcés, qui passeront de 2,6 à 1,6 fois ceux du régime général. Qui plus est, vous n'avez pas souhaité déterminer le niveau de rémunération du CPF de transition.

S'agissant de l'assurance chômage, la promesse était belle, mais la réponse est bien modeste : peu de démissionnaires et peu d'indépendants seront concernés. Par ailleurs, les menaces sur les postes à Pôle emploi ne nous laissent guère espérer de meilleurs résultats, et les chiffres du chômage publiés aujourd'hui nous confirment que vous avez baissé la garde, en dépit du retour de la croissance et du dynamisme de l'économie.

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