Je suis ravi de vous retrouver pour cette dernière réunion plénière. Je tiens à remercier les administrateurs, car les cent quatre-vingts et quelques pages que vous avez sous les yeux leur doivent beaucoup et sont très fidèles à la teneur de nos travaux. Je remercie également les députés qui se sont mobilisés autant qu'ils le pouvaient pendant une période somme toute assez courte. L'ensemble des documents, comptes rendus des auditions compris, compte plus de 750 pages ; nous avons, me semble-t-il, réalisé un travail sérieux.
J'ai tâché, dans le rapport, de me montrer le plus fidèle possible à nos échanges avec les différentes personnes auditionnées. Nous nous retrouvons tous sur le plus grand nombre de propositions et j'en aurai pour ma part deux ou trois complémentaires qui n'emportent pas nécessairement, je le sais, l'adhésion de tous.
On sait très bien qu'il n'y a pas de recette magique mais peuvent être menées des actions de court terme – donc immédiates –, mais aussi de moyen et long termes.
La ministre des solidarités et de la santé sera destinataire du rapport, comme je le lui avais promis, ce qui me semble être la moindre des choses.
Avant d'en venir aux propositions proprement dites, je souligne que ce rapport ne propose pas une révolution, il s'en faut ; mais nous nous sommes efforcés de tirer le meilleur parti des idées des députés et des propositions des personnes auditionnées.
La proposition n° 1 vise à inscrire au tableau de l'Ordre des médecins tout médecin titulaire d'un diplôme étranger qui exerce en France, en révisant la procédure d'autorisation d'exercice (PAE) et à dispenser de la période probatoire triennale les lauréats des épreuves anonymes de vérification des connaissances qui sont candidats à la profession de médecin, à la condition qu'ils s'engagent à exercer à titre libéral.
Vous avez bien compris que nous manquions de médecins et qu'on ne saurait les multiplier à partir de rien. On sait toutefois qu'il y a 12 000 médecins étrangers qui travaillent en France avec des diplômes étrangers, notamment ces fameux « mercenaires d'hôpitaux » – mais il y en a d'autres. Un grand nombre d'entre eux pourrait bénéficier de la PAE accélérée. C'est pourquoi nous proposons, largement encouragés par le Conseil national de l'Ordre des médecins et en particulier par son président, de supprimer la période probatoire triennale. Il s'agit donc de valider leurs connaissances et s'ils s'engagent à travailler dans le secteur libéral, nous pourrons ainsi récupérer immédiatement entre 1 500 à 2 500 médecins – et même peut-être davantage. Pour mémoire, en 1995, Édouard Balladur avait pris une mesure assez similaire. Il n'en demeure pas moins que, parmi ces médecins, il faut compter les médecins français qui vont se former à l'étranger, médecins qui, quand ils exercent ensuite en France, le font pourvus d'un diplôme étranger, et qui sont de plus en plus nombreux. Bref, une telle mesure permettrait de renforcer les effectifs de la médecine libérale.
Avec la proposition n° 2, il s'agit d'exonérer de toute cotisation de retraite, sans plafond de revenu annuel, les médecins exerçant en situation de cumul emploi-retraite dans les zones de tension. Ce sera évidemment une perte de recette pour la sécurité sociale, mais nous savons que tant qu'ils ne travaillent pas deux jours par semaine, cela n'est pas rentable, si j'ose dire ; il faut bien que nous trouvions un levier. Nous allons donc chercher des médecins titulaires d'un diplôme étranger, c'était la première proposition ; avec celle-ci, nous allons chercher des médecins retraités disposés à travailler deux ou trois jours avec une véritable incitation.
Le Conseil de l'Ordre tient beaucoup à la troisième proposition : la création d'un statut de médecin assistant de territoire. Entre l'issue de la formation d'un médecin – bac plus dix, au moins – et son installation, il y a une zone grise qui peut durer de quatre à sept ans. L'idée, déjà en vigueur pour les assistants des hôpitaux, est que le médecin s'engage pendant deux ans à travailler dans un territoire sous-dense moyennant une petite incitation financière – de 5 000 euros versés sur deux ans. Ce statut d'une durée de deux ans, reconductible pour une année supplémentaire, est protecteur – nombreux sont les médecins qui se demandent, une fois formés, ce qui va leur arriver s'ils ont un « pépin » – et assure une rémunération, financée par les structures hospitalières pour peu, je le répète, que ceux qui en bénéficient exercent dans une zone sous-dense. Grâce à ce statut, ces médecins, pendant ces fameuses années, peuvent ainsi rendre compatibles leur vie familiale et leur activité professionnelle.
Toujours pour tenir compte de l'avis du Conseil de l'Ordre, la quatrième proposition vise à substituer un régime déclaratif au régime d'autorisation de l'exercice en qualité de médecin adjoint ou remplaçant. En effet, si vous êtes médecin remplaçant, il vous faut écrire au conseil départemental de l'Ordre des médecins (CDOM) pour lui demander l'autorisation de faire un remplacement, par exemple du 15 au 30 juillet, et il vous faut attendre sa réponse. Nous proposons donc de passer à un régime déclaratif, gage d'efficacité et de souplesse.
J'en viens à la cinquième proposition. Il y a chaque année entre 10 000 et 11 000 médecins « thésés » – qui sont donc docteurs en médecine – ou « non-thésés », c'est-à-dire qui ont terminé leur formation mais qui n'ont pas passé leur thèse. Je rappelle que ces derniers ont trois ans pour la soutenir et que, désormais, ils peuvent la passer dans la dernière phase du troisième cycle – auparavant, on ne pouvait pas soutenir sa thèse avant la fin de l'internat. Un médecin remplaçant « thésé » ne peut pas travailler en même temps que le médecin qu'il remplace. Il s'agit ici de créer un statut de « médecin volant » qui permettrait à des médecins « thésés » de venir ponctuellement épauler d'autres médecins, en particulier ceux installés en zones sous-denses, en qualité de travailleurs non-salariés (TNS). Dans le système en vigueur, les honoraires perçus par le remplaçant sont versés sur le compte du médecin qu'il remplace et qui, ensuite, les lui rétrocède. Aussi, grâce au statut de TNS, désormais, il percevra une rémunération à l'acte et pourra exercer en même temps que le médecin généraliste qu'il vient remplacer – de plus, cette forme de parrainage nous paraît une bonne chose.
La sixième proposition porte sur le fameux dossier médical partagé. On nous annonce une mise en ligne au mois de septembre. Je regarde notre collègue Agnès Firmin Le Bodo, qui sait qu'on en est loin – je peux pour ma part en témoigner pour ma profession !