La circulaire dont j'ai parlé ne porte pas sur les modalités d'accueil mais sur la vidéoprotection – je la tiens à votre disposition. Je rappelle également qu'en matière de vidéoprotection, j'ai limité l'accès aux images aux territoires concernés. À mon arrivée à la préfecture de police, on pouvait en effet accéder à toutes les images à partir de n'importe quel point de la plaque parisienne relevant des compétences du préfet de police, ce qui nous a valu quelques petits soucis, pour lesquels j'ai d'ailleurs dû saisir l'IGPN, comme en juin 2017, lorsqu'un de nos fonctionnaires de police a reçu un coup de marteau sur le parvis de Notre-Dame, agressé par un individu radicalisé : les images de l'agression qui ont circulé sur tous les écrans de télévision avaient été récupérées depuis un commissariat assez éloigné des lieux de l'attaque.
En ce qui concerne l'accueil d'observateurs, la préfecture de police est très régulièrement sollicitée, et notre position de principe est d'accepter, dans une logique d'ouverture. Les publics concernés sont essentiellement au nombre de trois. Un premier groupe se compose d'observateurs dont les demandes s'inscrivent dans le cadre de la formation, ce qui inclut des publics scolaires et étudiants : depuis le début de l'année 2018, nous avons ainsi accueilli sept cents personnes. Dans cette catégorie en formation entrent également les auditeurs de justice, les stagiaires de l'Institut national des hautes études de la sécurité et de la justice, des policiers et auditeurs étrangers, des cadres de santé, des policiers municipaux, beaucoup d'élèves de grandes écoles – Polytechniques, les IRA, l'ENA, ou Sciences-Po Paris, dans le cadre notamment de la cellule Synapse.
La seconde catégorie d'observateurs est composée de spécialistes de l'information, en particulier de journalistes qui souhaitent pouvoir observer en immersion le fonctionnement des services de police. Ces demandes sont traitées par mon cabinet et le service de communication : depuis le début de l'année, plus de soixante délégations de presse ont ainsi été admises au contact de ces services.
La troisième catégorie enfin se compose, dans le cadre des liens entre police et population, de nos interlocuteurs institutionnels, souvent des élus, parlementaires, maires d'arrondissement ou de communes de la petite couronne qui, par exemple, veulent observer le fonctionnement de la BAC. Ne sont pas incluses dans ces catégories les visites institutionnelles comme celle du Défenseur des droits ou celles que vous êtes à tout moment autorisés à effectuer dans les centres de rétention administrative.
En ce qui concerne les activités auxquelles participent les observateurs, on peut distinguer de manière assez simple d'abord l'observation classique au sein des locaux, qui permet d'étudier l'organisation des services. Cela peut se faire y compris dans notre salle d'information et de commandement, où il est très enrichissant d'assister à la gestion d'une importante manifestation et d'un gros service d'ordre, comme celui du 14 juillet ou celui mis en place à l'occasion du retour de l'équipe de France de football.
Évidemment nous n'accueillons de public que dans les locaux accessibles, et non dans les locaux protégés par l'instruction générale 1 300 sur la protection du secret de la défense, où personne n'est jamais accueilli.
Les observateurs peuvent ensuite accompagner des patrouilles, des brigades –notamment les BAC – ou des services d'ordre sur la voie publique.
J'en terminerai par le cadre juridique. Actuellement, toutes les observations qui s'inscrivent dans une logique de formation sont encadrées par des conventions. Cela concerne les publics scolaires, pour lesquels il existe même une assurance couvrant les collégiens et les lycéens, mais également les structures de formation qui nous envoient des observateurs. Ces conventions sont gérées par la direction des ressources humaines de la préfecture de police, y compris pour les stagiaires individuels. À titre d'ordre de grandeur, en 2017, 1 123 stagiaires ont ainsi été accueillis dans le cadre d'une convention, ce qui est assez important.
Pour ce qui concerne la presse et les journalistes, nous avons récemment mis en place, sur proposition de mon service de communication, la signature de conventions avec les journalistes, afin de bien définir ce qu'ils sont ou non autorisés à faire. Cela répond notamment à une décision de la chambre criminelle de la Cour de cassation ayant annulé une procédure au motif que l'interpellation et l'intervention s'étaient faites en présence de journalistes, et qui avait été suivie d'une jurisprudence du Conseil constitutionnel.
Quant à la troisième catégorie d'observateurs, c'est pour elle que le cadre juridique mériterait d'être défini avec plus de rigueur, je suis le premier à le dire. En premier lieu, les autorisations doivent être délivrées à un niveau pertinent, ce qui ne signifie pas que le préfet soit systématiquement saisi. Si le maire de Clamart, par exemple, souhaite accompagner les services de la Direction de la sécurité de proximité de l'agglomération parisienne (DSPAP), la logique voudra qu'il s'adresse au commissaire de l'endroit, qui va apprécier l'opportunité de la demande et en référer à sa hiérarchie, laquelle en réfèrera à son tour au préfet s'il existe une sensibilité particulière liée à la situation ou à la personne qui fait la demande.
Je souhaite que l'épisode que nous traversons nous incite à engager des réflexions sur les enjeux juridiques qui peuvent surgir et, de ce point de vue, la mission que le ministre d'État a confiée à l'IGPN sera extrêmement intéressante.
Je ne pense pas qu'on puisse donner à ces personnes le statut de collaborateur bénévole du service public, parce que, par construction, ils sont observateurs et non associés à l'exécution du service public. Nous devons donc nous interroger sur leur couverture, le cadre dans lequel l'État assure les risques qu'ils prennent et couvre les dommages qu'ils peuvent créer.
Prenons l'exemple d'un haut fonctionnaire en observation, victime d'un accident dans un véhicule d'intervention : il est indispensable que son statut juridique soit précisé, a fortiori si l'accident a emporté des conséquences graves.
J'ai été un peu long, mais il m'a semblé important de vous préciser quelles étaient les évolutions que j'entendais amorcer vers davantage de rigueur juridique.