Je voudrais d'abord remercier Mme la rapporteure et l'ensemble des auteurs d'amendements ayant pour objet de rétablir l'article 1er, supprimé par le Sénat. Mme la rapporteure de la commission des lois du Sénat, auteure de l'amendement de suppression, s'appuyait essentiellement sur l'argument consistant à vouloir éviter la guerre des polices pouvant résulter de la création d'un service supplémentaire.
J'insiste sur le fait que le nouveau service n'aurait pas vocation à s'autosaisir : c'est le procureur de la République ou un juge qui déciderait de confier telle ou telle enquête à un service instructeur – la BNRDF, le SNDJ, la police fiscale ou la police judiciaire. Il me semble pour le moins étonnant de reconnaître que la justice dispose des compétences et de l'opportunité des poursuites en matière de fraude fiscale, tout en refusant de la laisser choisir, entre les différents services susceptibles d'intervenir, celui qui lui paraît le plus compétent pour chaque affaire.
Si le service de police fiscale dispose aujourd'hui de compétences importantes – il peut notamment procéder à des perquisitions –, la question de ses moyens, en particulier de ses effectifs, se pose. Pour répondre à la question qui m'a été posée, je vous confirme que ses effectifs ne seront pas pris sur ceux de la BNRDF, c'est-à-dire du ministère de l'intérieur. Il y a, au sein du ministère de l'intérieur, des agents du fisc français – personnellement, je regrette qu'ils ne soient pas responsables des enquêtes, ce qui pose parfois problème.
Il ne s'agit pas, pour le ministère de l'action et des comptes publics – j'ai d'ailleurs écrit en ce sens au ministre de l'intérieur, et je tiens à disposition des rapporteurs les documents engageant mon administration sur ce point –, de retirer des effectifs équivalents temps plein à la BNRDF ni au ministère de l'intérieur. Pour répondre précisément à la question de Mme Pires Beaune, nous allons créer dans un premier temps, c'est-à-dire d'ici à la fin de 2019 ou au début de 2020, une trentaine de postes, puis une cinquantaine d'ici la fin du quinquennat. Le temps sera alors venu d'évaluer le fonctionnement de ce service – je pense qu'il est important que le Parlement et que les administrations le fassent.
Le service d'enquête douanière instauré il y a quelques années par M. Perben et qui avait, lors de sa création, suscité à peu près les mêmes débats, a largement démontré son efficacité, et c'est bien à côté de ce service d'enquête douanière, qui a atteint un excellent niveau de maturité et de compétence, que doit prendre place le nouveau service de police fiscale – quand je dis « à côté », c'est aussi au sens littéral du terme, car les locaux des deux services seront proches, et partageront certaines formations dispensées par les douaniers.
Je vous confirme que le service sera créé grâce à des recrutements spécifiques, même s'il sera fait appel aux compétences et au savoir-faire propres aux services de contrôle fiscal existants, et je précise qu'il interviendra dans des domaines très spécialisés, notamment celui de la TVA, qui constitue une grande partie des plaintes fiscales déposées – ce qui est assez somme toute logique, dans la mesure où la TVA représente la principale recette fiscale de l'État. Les enquêtes relatives au blanchiment, à la contrefaçon ou aux stupéfiants sont généralement confiées au service des enquêtes douanières, alors que celles concernant des sujets plus larges relèvent plutôt des attributions de la BNRDF, qui a un grand nombre de plaintes à instruire – à ma connaissance, elle en a plus de 500 à traiter à l'heure actuelle, certaines nécessitant parfois plusieurs années d'enquête, et elle règle entre 30 et 50 affaires par an. Quant aux affaires relevant manifestement de la fraude fiscale, on peut imaginer qu'elles seront plutôt confiées à la police fiscale. Cela dit, il appartiendra au juge et au procureur de la République de choisir tel ou tel service, en fonction de la nature de l'affaire.
Pour conclure, je vous redis que nous ne prendrons pas d'effectifs à la BNRDF pour créer la police fiscale, et je suis disposé à le réaffirmer dans l'hémicycle le moment venu.