Intervention de Valérie Depadt

Réunion du jeudi 19 juillet 2018 à 8h30
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Valérie Depadt, maître de conférences à l'université Paris :

Concernant l'accouchement sous X, il faut absolument réserver cet accès aux origines à l'AMP. Ce n'est pas une question de droit. Bien évidemment, le droit traduira la décision qui sera prise, mais l'accouchement sous X relève des aléas et des drames de la vie, alors que l'assistance médicale à la procréation, même si, certes, c'est un drame de ne pas pouvoir concevoir un enfant comme on le souhaite, c'est en tout cas un drame maîtrisé. Le remède est maîtrisé. On ne peut comparer les deux situations.

Supprimer l'accouchement sous X revient à mettre des femmes et des enfants en danger. L'accouchement sous X est une mesure compassionnelle. Je suis heureuse qu'elle soit maintenue dans notre droit. Pour moi, les deux questions sont tout à fait différentes, et l'on sait d'ailleurs que des femmes belges viennent actuellement accoucher sous X en France. C'est une des dispositions qui, à mon avis, montrent la compassion dont est capable la France.

Concernant le don de produits du corps humain, en général, il est une question fondamentale à la base de tout notre débat sur l'accès aux origines : le don de gamètes est-il un don ordinaire ? Est-il comparable à l'ensemble des autres dons ? Ma réponse est « non ». Vous vous en doutiez car, comme je vous le disais en introduction, une personne va naître de ce don et cette personne trouvera ses origines génétiques – et je pense qu'on peut le dire sans complexe – dans le don.

Il est une troisième personne, le protagoniste de l'histoire, qui n'est ni le donneur ni le receveur, mais l'enfant qui va en naître. C'est ce qui modifie toute la philosophie et toute la politique à adopter en cette matière. C'est la raison pour laquelle permettre l'accès aux origines en matière de don de gamètes n'impactera pas l'anonymat des produits du corps humain entre donneur et receveur, puisque cet anonymat sera maintenu entre donneur et receveur en matière de don de gamètes. Simplement, en matière de don de gamètes, il y a une phase suivante, qui est la naissance de l'enfant, et qui n'existe pas dans les autres types de dons.

En ce qui concerne le profil du donneur, dans la mesure où nous sommes quasiment le dernier pays d'Europe à maintenir l'anonymat envers l'enfant et à l'empêcher d'accéder à ses origines, nous avons le bénéfice de ce qui s'est passé chez nos voisins. De nombreux rapports ont été élaborés sur ce sujet. On sait ce qui se passe. Dans un premier temps – parce que, lors d'un changement, la phase de transition est toujours difficile –, les dons baissent. C'est vrai, mais ce n'est pas une raison pour ne pas modifier une loi qui fait souffrir des personnes. Puis le nombre de dons remonte, parfois plus haut qu'il n'était, avec un profil différent de donneurs : des donneurs qui ont peut-être davantage réfléchi, agi moins impulsivement, et qui sont prêts à se faire connaître – en tout cas, à être connu de l'enfant devenu majeur.

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