Voilà où nous en sommes. Chers collègues, j'ai fait cette remarque à cette heure pour vous faire sourire. Il faut bien, également, sourire, sinon l'on n'en finit plus de pleurer.
Monsieur le ministre, il faut que, sur cette question de la qualité, le texte marque là aussi une rupture.
Voilà donc les trois sujets sur lesquels ce texte n'est pas au rendez-vous : premièrement les prix, parce qu'en la matière tout repose sur une illusion, la culture contractuelle ; deuxièmement la qualité des produits, compte tenu également du retard que nous sommes en train de prendre sur la reconstruction, troisièmement, évidemment, la souffrance animale.
Je vais conclure sur ce dernier thème. Tout à l'heure, mon collègue François Ruffin dira sur ce sujet tout mieux que moi, et de façon plus précise, parce qu'il a écrit de très bons livres sur le sujet.
La souffrance animale n'est pas seulement une question de sensibilité, encore que la sensibilité à la détresse des autres soit une préparation à l'empathie humaine. La sensibilité, c'est-à-dire le fait qu'admettre qu'un animal est un être sensible, n'est pas une sensiblerie, mais un autre regard porté sur le monde.
Si l'on regardait le monde de cette manière, peut-être ne le brutaliserait-on pas dans tous les autres domaines comme nous le faisons : je pense au domaine social, mais également à tous les autres rapports à la nature.
Il faut marquer des coups d'arrêt : franchement, j'étais présent lors de l'examen du projet de loi en première lecture, et lorsque nous avons abordé la question des poussins mâles que l'on jette dans les déchiqueteuses, nous étions tous ici, dans cet hémicycle, au bord de la nausée.
En effet, certains de nos collègues n'étaient pas au courant, d'autres découvraient la chose. Vous-même, monsieur le ministre, qui êtes comme moi et comme tout le monde ici, aviez trouvé cette idée horrible.
L'on nous a répondu qu'il existait une étude permettant de déterminer, dès le stade de l'oeuf, s'il abritait un poussin mâle ou un poussin femelle. Très bien, mais en attendant, l'on continue à les broyer, et ce n'est pas acceptable.
C'est exactement comme l'affaire du glyphosate : si une chose est inacceptable, on doit arrêter. L'on me dit que cela crée des situations économiques délicates : eh bien examinons-les !
Voyons comment l'on peut aider les gens qui avaient besoin de ce type de traitement à produire sans y recourir. Il est plus simple de régler un problème financier ou technique que de perpétuer des actes de barbarie de cette nature.
Il en va de même s'agissant du glyphosate : je le dis avec tout le respect que je dois à notre collègue du groupe UDI, Agir et indépendants qui m'a précédé à cette tribune. Cher collègue, vous nous avez dit des choses très pertinentes, que nous entendons tous.
Mais enfin, si ce produit est, comme l'on nous l'a dit, dangereux, dans ce cas arrêtons tout de suite de l'utiliser. Vous nous dites, ce que tout le monde peut entendre, que l'on ne peut arrêter tout de suite cette utilisation.
Je vous demande également d'entendre les conséquences, que nous connaissons, induites par une telle utilisation : les malformations, les maladies, les cancers et le coût pour la société, que je mentionne pour terminer ma liste.
Il va donc falloir arrêter de l'utiliser : nous avons prévu de le faire dans un délai de trois ans. Nous trouvons que ce délai est trop long et souhaitons qu'il soit immédiatement interdit.
En effet, l'Union européenne a, monsieur le ministre, décidé une chose différente, qui s'imposera à nous : elle a prolongé le droit d'utiliser les glyphosates pour cinq ans, période à l'issue de laquelle une clause de revoyure est prévue.
Vous verrez qu'à ce moment-là les mêmes lobbies vont repasser à l'offensive lorsque Bayer et Monsanto – curieusement, d'ailleurs, avec l'accord de la Commission européenne – vont avoir terminé de fusionner et lorsque le gouvernement allemand va venir, comme il l'a fait la dernière fois, contre l'avis du président français – nos voisins d'outre-Rhin se sont en effet passés de notre avis – défendre son autorisation pour cinq ans de plus.
Vous allez voir si vous allez pouvoir simplement les défier de la sorte. C'est en effet maintenant qu'il faut leur dire : on le fera.
Et quand nous, Français, nous désobéissons et fronçons les sourcils, les choses changent. La dernière fois que nous l'avons fait, c'était pour les cerises ; comme le produit que l'on foutait dessus était une horreur – il était cancérigène – , nous l'avons interdit. Bien sûr, nous avons eu droit aux récriminations de la Commission européenne, mais nous n'avons rien changé ; nous avons continué à faire comme nous, nous avions décidé de faire. Eh bien, que s'est-il passé ? D'autres pays ont changé de position et ont décidé d'interdire eux aussi le produit, car ils se sont dit que si les Français le faisaient, c'est que le problème devait être grave.