Intervention de Roland Lescure

Séance en hémicycle du mardi 25 septembre 2018 à 15h00
Croissance et transformation des entreprises — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaRoland Lescure, rapporteur de la commission spéciale chargée d'examiner le projet de loi relatif à la croissance et la transformation des entreprises :

En 1960, les grandes inventions se faisaient dans un bureau à l'Élysée, avec trois ingénieurs ; ce fut ainsi pour le nez du Concorde ou les centrales nucléaires. La guerre froide a elle aussi provoqué des innovations, dont nous bénéficions encore tous les jours – l'internet est un bébé de la guerre froide. Aujourd'hui, les innovations, ce n'est plus à l'Élysée ou dans le cadre de la guerre froide qu'elles se font, c'est dans les garages, les chambres, les entreprises, les laboratoires. Tout ce que vous nous proposez, monsieur le ministre, pour susciter de l'innovation de rupture – le Fonds pour l'innovation, le statut de chercheur-entrepreneur – va dans le même sens, celui de la définition du rôle de l'État au XXIe siècle : un État stratège, un État innovant, mais aussi un État qui protège.

Deux acteurs ne sont pas nommément cités dans le texte, alors qu'ils y sont présents. Le premier, c'est le consommateur – ou plutôt le « consommacteur ». Nous sommes tous des consommateurs, dans ces travées, que nous soyons entrepreneurs ou salariés, et nous tous faisons face, quand nous avons un peu de temps, le week-end, à notre devoir de responsabilité dans notre façon de consommer. Cela se vérifie tous les jours. Certaines entreprises font du ripolinage ; elles annoncent, dans leurs publicités, de grands objectifs sociétaux et environnementaux, mais leurs pratiques vont à l'encontre de ceux-ci. Je ne citerai pas de noms, mais cela a été illustré récemment par certaines chaînes de café ou sociétés de transport. À côté, il existe des entreprises qui sont prêtes à mettre au coeur de leur mission des objectifs qui vont au-delà de la quête du profit. J'ai rencontré il y a quelques jours, dans le cadre des auditions, des représentants de la société Biocoop, que vous connaissez tous. Eh bien, celle-ci est véritablement prête à changer les habitudes de consommation en France, via la distribution de produits biologiques de qualité par circuits courts. En précisant les trois étages de la fusée – l'objet social, la « raison d'être » et les sociétés à mission – , nous redéfinissons ce qu'est une entreprise en France au XXIe siècle et nous donnons à ces entreprises la possibilité de devenir des acteurs sociaux à part entière.

Le deuxième acteur, qui est absent du texte nommément mais qui est très présent, ce sont les territoires. Si nous souhaitons résorber la fracture territoriale, il faut que les entreprises puissent naître, croître et exporter à partir de tous les territoires. La réforme des grandes entreprises financières publiques françaises que sont la Caisse des dépôts et consignations, CNP Assurances et La Poste, que vous proposez, monsieur le ministre, va dans ce sens.

Avant de terminer, je veux dire deux mots de mon rôle de rapporteur général. Ce rôle sera, comme j'espère l'avoir montré en commission, d'écouter les suggestions venant de tous les bancs, mais aussi d'appuyer les rapporteurs thématiques dans leur travail et d'être une sorte de gardien du temple, afin que nous maintenions l'équilibre de ce texte, qui doit libérer, mais aussi protéger, qui doit nous permettre de prospérer, mais aussi de responsabiliser.

Je présenterai en mon nom deux amendements. Le premier tend à créer un fonds de pérennité économique – j'y reviendrai lors d'une séance ultérieure. Quant au second, je voudrais vous en dire deux mots tout de suite, car il ne sera présenté qu'à la fin de l'examen du texte, or je pense qu'il est important pour tout le monde. Je souhaiterais que l'Assemblée se saisisse de l'évaluation de la loi grâce à un dispositif ad hoc, qui nous permette d'assurer tous ensemble le suivi des enjeux majeurs du texte. Cet amendement, qui vous sera présenté dans quelques jours, je suis prêt à le modifier en fonction des suggestions venues des différents bancs, de manière à ce que nous puissions vous suivre de près, monsieur le ministre, madame la secrétaire d'État, pour l'application, l'exécution et l'évaluation de la loi.

En 1936, Charlie Chaplin caricaturait, dans Les Temps modernes, les excès du productivisme, de l'automatisme et de l'accélération du temps, qui viendraient à faire littéralement « péter un boulon » aux travailleurs, dont les conditions de vie étaient ravagées par l'industrialisation et par une société qui déresponsabilisait les individus en les aliénant. Bien loin de l'image de Charlie Chaplin, le projet de loi « PACTE » redéfinit l'entreprise du XXIe siècle à partir des défis de notre temps : libérer, prospérer, responsabiliser et protéger,...

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