Intervention de Pierre le Coz

Réunion du jeudi 6 septembre 2018 à 9h15
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Pierre le Coz, Professeur de philosophie à la faculté de médecine de Marseille, président du comité de déontologie de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) :

On pourrait effectivement imaginer qu'un couple de femmes fasse appel à un donneur, à un tiers ; des associations militent pour que des homosexuels accèdent à la parentalité. Mais peut-être pourraient-elles aussi proposer des choses à la société, particulièrement ce mode d'organisation consistant à ce que les couples de femmes disposent, au sein d'une association, d'un homme apportant des gamètes. Je ne suis pas défavorable à cette solution, car dans ce cas les choses sont claires : l'enfant n'est pas exposé à une quête de ses origines, qui représente tout de même 50 % de son patrimoine génétique ! Comment ne pas voir une forme de violence dans le fait de priver un enfant de l'accès à son géniteur ?

Je suis donc pleinement d'accord avec vous pour imaginer des solutions n'ayant pas encore été prévues.

Par ailleurs, à plusieurs reprises j'ai entendu dire que si la France n'adapte pas sa législation, les gens iront à l'étranger. Mais, et nous l'avons constaté dans notre rapport fait au Conseil d'État : le monde se rétrécit, par l'internet, par les voyages aériens à bas coûts, par le paiement par carte bleue. La planète n'est plus qu'un vaste village. Dès lors, dire : « Faisons-le chez nous, sinon les gens iront à l'étranger » est sans portée puisque les intéressés le feront de toute façon.

Quand bien même nous autoriserions l'accès aux gamètes dans notre pays, les gens iront tout de même au Danemark, en Belgique ou je ne sais où parce que la liste d'attente y sera moins longue, qu'ils pourront choisir la qualité du sperme, etc. : il s'agit d'un marché ! En tout état de cause, vous pouvez être rassurée : les gens iront à l'étranger. Le temps où nous étions clos dans nos frontières et empêchions nos compatriotes d'aller à l'étranger en leur disant que l'on allait s'occuper d'eux est révolu.

Je pense d'ailleurs que les pays recevant la clientèle française sont déjà en train de réfléchir à la façon de s'y prendre pour continuer à la séduire et à l'attirer.

Vous avez, madame Fajgeles, évoqué le divorce, et vous avez raison de dire qu'au départ cette situation était atypique et difficile à vivre pour les enfants ; depuis elle s'est banalisée. Mais cet argument peut-il être utilisé dans le cadre de l'homoparentalité ? Allons-nous considérer que, pour le moment, les gens sont plutôt hétérosexuels, et que dans dix ou vingt ans la moitié de l'humanité sera homosexuelle ? Cela constitue une pure conjecture dont nous ne savons rien.

On ne peut pas affirmer que les enfants concernés ne seront pas victimes de cette marginalisation, puisque je crois que, dans toute société, pour des raisons purement biologiques, l'hétérosexualité primera toujours.

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