Intervention de Jean-Louis Touraine

Réunion du jeudi 13 septembre 2018 à 10h15
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Touraine, rapporteur :

Je suis d'accord avec la très claire démonstration concernant la PMA et la GPA faite par Mme Gründler. Je la résume : les femmes homosexuelles et les femmes seules ayant le droit d'adopter des enfants, on ne peut les priver du droit à l'accès à l'AMP déjà ouvert aux couples hétérosexuels. Á l'inverse, en ce qui concerne la GPA, pour les hommes en particulier, le principe de non-discrimination ne s'applique pas puisque cette technique n'est pas admise pour les couples hétérosexuels en France. Mais comme il n'est pas interdit d'aller solliciter une GPA dans des pays voisins, se pose la question de la filiation des enfants nés de GPA réalisées à l'étranger. Dans ce contexte, la Ligue est-elle d'accord avec la CEDH sur la nécessité de faire évoluer la loi française pour que les droits de l'enfant né d'une GPA, qui n'a pas à porter la responsabilité des conditions de sa procréation, soient reconnus, sans que cela implique de changer forcément notre législation sur la GPA elle-même ?

D'autre part, la France est probablement, parmi les pays européens, l'un de ceux qui essayent de limiter au maximum l'accès aux données personnelles de santé. Mais l'on se demande parfois si d'une part cet excès de souci de protection n'entraîne pas une certaine inefficacité et si, d'autre part, il ne va pas contre l'intérêt des malades eux-mêmes. Si je parle d'inefficacité, c'est que les données du SNIIRAM comme celles du programme de médicalisation des systèmes d'information (PMSI) des hôpitaux sont vendues à des personnes qui sont évidemment tous à fait dignes de les utiliser, mais que ces données se retrouvent ensuite dans des sociétés commerciales, du fait de plusieurs intermédiaires. Cela aboutit à des abus, comme des propositions d'objets connectés faites aux malades qui sortent de l'hôpital, les diabétiques par exemple. Visiblement, l'efficacité alléguée de la procédure n'a pas suffi à empêcher qu'elle soit détournée. D'autre part, comme vous l'avez indiqué, la lenteur de la mise en place du DMP a eu pour conséquence l'apparition d'alternatives. Les médecins du XXIe siècle n'entendant pas travailler comme du temps de Roger Martin du Gard, des systèmes commerciaux se sont développés, qui ne prévoient pas les mêmes contrôles.

Ce constat étant fait, comment progresser ? Ne pourrait-on se dire, comme le font certains pays d'Europe du Nord, que le plus simple est de ne pas tout contrôler en amont mais d'être extrêmement sévère en aval ? Notre prérogative serait alors de définir de lourdes pénalités pour sanctionner tous ceux – l'employeur, l'assureur, le commercial – qui, au mépris de la confidentialité des données personnelles de santé, se seraient procuré indûment des listes de malades et utiliseraient ces données de façon inappropriée.

Vous nous avez dit que le respect des droits de l'homme peut impliquer un droit plus large à la connaissance de ses origines, ce qui recueille un assez large assentiment. La LDH considère-t-elle aussi qu'il convient d'élargir le droit d'accès aux informations génétiques ? Actuellement, on ne peut y avoir accès en France que sur prescription médicale mais on peut recourir à des laboratoires d'autres pays européens ou américains. Selon la Ligue, est-ce un droit de pouvoir connaître les gènes de prédisposition à une maladie, et donc de renforcer la prévention d'une pathologie donnée – par exemple, si l'on a de forts risques de développer un diabète, on consommera un peu moins de sucre et l'on fera plus d'exercice physique ?

Enfin, le docteur Bertrand de Rochambeau, président du Syndicat national des gynécologues-obstétriciens, vient de faire une déclaration tonitruante contre la pratique de l'interruption volontaire de grossesse (IVG). Conformément à la clause de conscience, ce médecin peut tout à fait signifier qu'il ne veut pas réaliser cet acte lui-même, mais il va bien au-delà en qualifiant l'IVG « d'homicide » et, si l'on comprend bien, en ne se soumettant pas à l'obligation légale d'aider la femme qui le demande à trouver le praticien qui le réalisera. Quel avis portez-vous sur les praticiens qui non seulement ne font pas d'IVG, ce qui est leur droit, mais qui, de plus, font tout pour dissuader les femmes de trouver le praticien qui satisfera leur demande ?

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