Intervention de Didier Migaud

Réunion du lundi 24 septembre 2018 à 18h00
Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire

Didier Migaud, président du Haut Conseil des finances publiques :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur général, mesdames et messieurs les députés, je vous remercie de m'avoir invité devant votre commission, en tant que président du Haut Conseil des finances publiques, afin de vous présenter les principales conclusions de notre avis relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2019.

L'exercice qui nous rassemble aujourd'hui est désormais bien rodé : c'est en effet la sixième fois que notre Haut Conseil rend un avis sur le projet de loi de finances et de financement de la sécurité sociale, et la deuxième fois sous cette législature.

Comme vous le savez, la mission du Haut Conseil ne consiste pas à produire ses propres prévisions. Il doit se prononcer sur les prévisions macroéconomiques présentées par le Gouvernement à l'occasion du PLF et du PLFSS pour 2019 ainsi que sur la cohérence de ces projets avec les orientations pluriannuelles de solde structurel.

Cette mission nous conduit à réaliser une analyse approfondie des textes qui nous sont soumis par le Gouvernement. Pour formuler notre avis, nous nous appuyons sur des prévisions issues d'un ensemble d'organismes, tels que la Commission européenne, le Fonds monétaire international (FMI), l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Nous sollicitons également de nombreux prévisionnistes nationaux comme l'Institut national de la statistique et des études économiques (INSEE), la Banque de France, le Centre d'observation économique et de recherches pour l'expansion de l'économie et le développement des entreprises (COE-REXECODE) et l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), que nous avons d'ailleurs auditionnés dans le cadre de nos travaux cette année.

Voilà pour la méthode.

En guise d'introduction, je voudrais tout d'abord revenir sur le contexte macroéconomique dans lequel s'inscrivent les deux textes qui nous ont été soumis. J'en viendrai ensuite aux appréciations que porte le Haut Conseil sur les prévisions macroéconomiques formulées par le Gouvernement et sur le scénario de finances publiques qui leur est associé.

J'évoquerai en premier lieu le contexte macroéconomique dans lequel interviennent le PLF et le PLFSS.

Au cours des derniers mois tout d'abord, la croissance mondiale s'est infléchie, légèrement en Europe et au Japon, et plus fortement pour certains pays émergents. À l'inverse, elle s'est affermie aux États-Unis. Le dynamisme de l'activité économique américaine devrait d'ailleurs, d'après la plupart des prévisions disponibles, continuer de soutenir la croissance mondiale.

S'agissant de la zone euro, la croissance économique accuse un léger ralentissement. Elle est ainsi passée d'un rythme trimestriel de 0,7 % en 2017 à 0,4 % au premier semestre 2018. Cette tendance reflète un environnement international devenu moins favorable depuis l'été 2017.

Les causes sont multiples et bien connues de votre commission. J'en citerai néanmoins quelques-unes, telles que la hausse des prix du pétrole, l'appréciation de l'euro et l'accroissement des incertitudes commerciales et politiques pesant sur l'économie mondiale. Symptôme des facteurs que je viens de rappeler, le climat des affaires tiré des enquêtes de conjoncture européennes s'est replié au cours du premier semestre 2018 après avoir atteint des niveaux très élevés en fin d'année 2017.

Malgré ces signaux, plusieurs paramètres d'activité demeurent positifs. Le climat des affaires reste aujourd'hui encore supérieur à sa moyenne observée sur une longue période. La croissance européenne bénéficie également de l'orientation toujours favorable de la politique monétaire ainsi que des effets bénéfiques de politiques budgétaires légèrement expansionnistes.

Ainsi, passé le ralentissement dont je viens de vous rendre compte, et d'après les prévisions disponibles, la croissance de la zone euro devrait à l'avenir se stabiliser.

J'en viens à présent à la situation de la France.

Le ralentissement de l'activité économique française observé au début de l'année 2018 a été plus prononcé que celui de la moyenne de la zone euro. Notre croissance s'est en effet limitée à 0,2 % pour chacun des deux premiers trimestres 2018.

Cet écart avec nos partenaires européens tient essentiellement à la situation des ménages. La consommation des ménages français a ainsi stagné au cours du premier semestre 2018 alors qu'elle continuait d'augmenter à un rythme assez soutenu chez nos voisins. L'une des explications que l'on peut avancer à ce différentiel réside dans le calendrier des mesures fiscales nouvelles qui ont pesé, au cours du premier trimestre, sur le pouvoir d'achat des ménages. D'autres facteurs temporaires peuvent expliquer ce ralentissement : c'est le cas, par exemple, des grèves intervenues dans le secteur des transports.

La situation et les perspectives de croissance que je viens de vous exposer s'agissant de l'activité mondiale, européenne et nationale sont toutefois entachées d'incertitudes dont rend compte l'avis du Haut Conseil.

Pour 2019, les perspectives de croissance sont entourées de risques économiques importants.

Ces risques sont multiples. Je pense notamment à la montée des tensions commerciales, au résultat des négociations sur le Brexit, à la situation de l'Italie, aux déséquilibres financiers en Chine, à la fragilité de plusieurs pays émergents : la Turquie, l'Argentine, l'Afrique du Sud ou encore le Brésil. Il est également à craindre que le déséquilibre budgétaire américain et le relèvement des tarifs douaniers provoquent une accélération de l'inflation et un rééquilibrage défavorable de la politique monétaire américaine.

Enfin, et pour achever ce cadrage, le Haut Conseil souligne que le poids élevé de l'endettement public et privé observé dans de nombreux pays fait peser un risque supplémentaire pour la croissance mondiale, dans un contexte de resserrement graduel des politiques monétaires.

J'en arrive aux observations formulées par le Haut Conseil sur le scénario macroéconomique du Gouvernement.

S'agissant de la croissance pour 2018, la prévision du Gouvernement établie dans le PLF pour 2019 est de 1,7 %.

Cette prévision est identique à celle qu'il avait retenue il y a un an à l'occasion du PLF pour 2018. Elle est toutefois inférieure à celle que le Gouvernement avait formulée au printemps dernier dans son programme de stabilité 2018-2022.

Compte tenu de l'acquis de croissance au deuxième trimestre 2018, estimé à 1,3 %, la réalisation en 2018 d'une croissance de 1,7 % en moyenne annuelle suppose une nette accélération de l'activité d'ici la fin de l'année à un rythme d'au moins 0,5 % par trimestre.

Ceci étant, plusieurs signaux permettent d'anticiper une remontée du taux de croissance au troisième trimestre 2018. Je pense, par exemple, à la production industrielle de juillet et aux dernières enquêtes de conjoncture dont nous avons eu connaissance.

Dans son avis, le Haut Conseil des finances publiques juge donc crédible la prévision de croissance du Gouvernement fixée à 1,7 %.

Cette prévision est d'ailleurs en phase avec celles des organisations internationales et des instituts de conjoncture, qui la situent pour la plupart entre 1,6 % et 1,7 %.

S'agissant de la croissance en 2019, qui s'élèverait à 1,7 %, le Haut Conseil considère que les hypothèses retenues par le Gouvernement quant à l'évolution de la demande des ménages et des entreprises sont plausibles.

Cette prévision de croissance pour 2019 est, là encore, en accord avec la moyenne des prévisions disponibles. La plupart présentent en effet une progression de l'activité en 2019, proche de celle anticipée pour 2018.

Le Haut Conseil considère donc que la prévision de croissance du Gouvernement pour 2019 est plausible. Il note toutefois que cette prévision est affectée d'un degré d'incertitude plus fort que les années précédentes. Comme je l'ai évoqué précédemment, cette incertitude provient essentiellement des risques pesant aujourd'hui sur l'environnement économique international, qui paraissent plus forts.

S'agissant des prévisions d'emploi et de masse salariale, le Haut Conseil estime pour 2018 que celles-ci sont cohérentes avec les informations disponibles. Pour 2019, les prévisions sont là encore plausibles.

Dans le détail et selon le Gouvernement, la masse salariale des branches marchandes non agricoles augmenterait en valeur de 3,5 % en 2018 et en 2019. Il s'agit d'une progression similaire à celle observée en 2017. La croissance de l'emploi s'affaiblirait en revanche progressivement jusqu'en 2019.

Dans le scénario établi par le Gouvernement, la prévision de masse salariale pour 2018 est revue à la baisse par rapport au programme de stabilité, qui l'avait fixée à 3,9 %. Cette révision vise à prendre en compte les données d'activité du premier semestre 2018.

Enfin, s'agissant des prix à la consommation pour 2018, la hausse des prix anticipée dans le PLF pour 2019 serait de 1,8 % en moyenne annuelle. L'inflation serait sensiblement plus élevée que le niveau prévu l'année dernière, qui s'établissait à 1,1 %. Pour l'essentiel, cette différence tient à l'évolution des prix de l'énergie.

Dans ce scénario, l'inflation sous-jacente, c'est-à-dire hors prix volatils comme ceux des carburants et de certains produits alimentaires, se redresserait progressivement, de 0,4 % en 2017 à 0,9 % en 2018. L'inflation sous-jacente serait soutenue notamment par une remontée des prix des services liés à celle des salaires.

Cette prévision d'inflation est cohérente avec les indices des prix constatés jusqu'en août 2018 et avec l'hypothèse d'une stabilisation du prix du pétrole à 73 dollars, soit 63 euros le baril de Brent.

J'en viens à présent à l'année 2019.

La prévision d'inflation formulée par le Gouvernement est de 1,4 % en moyenne annuelle. Elle anticipe donc une baisse de l'inflation par rapport à 2018, qui s'expliquerait par une moindre contribution des prix de l'énergie et des tarifs dits « administrés ». Dans ce scénario, l'inflation sous-jacente continuerait de remonter, sans refléter totalement l'accélération des salaires.

Ces prévisions pour 2018 et 2019 sont un peu inférieures aux moyennes du Consensus Forecasts de septembre, qui s'établissent respectivement à 1,9 % et 1,6 %.

En résumé, le Haut Conseil considère que les prévisions d'inflation retenues pour 2018 et 2019 sont raisonnables.

Voilà pour les observations relatives au scénario macroéconomique retenu pour les années 2018 et 2019. J'en viens maintenant aux observations formulées par le Haut Conseil sur les prévisions de finances publiques.

Pour commencer, je voudrais souligner le caractère particulièrement complexe de la lecture de l'évolution des finances publiques pour les années 2017 à 2019. Cette complexité tient à deux éléments.

Premier élément – et vous avez récemment entendu le directeur général de l'INSEE – cet organisme a procédé au début de ce mois à des révisions des comptes des administrations publiques. Ces révisions visent à intégrer le reclassement de SNCF Réseau au sein des administrations publiques, la comptabilisation de la recapitalisation d'Orano – anciennement Areva – et l'actualisation de données budgétaires par rapport aux chiffres de mars 2018.

Elles ont conduit à revoir les niveaux de déficit et de dette publique pour les années 2016 et 2017. Il en résulte une dégradation du déficit public nominal et du déficit structurel de 3,2 milliards d'euros en 2016 et de 1,9 milliard d'euros en 2017. Les déficits de 2018 et 2019 ne sont quant à eux affectés que de manière marginale par ces révisions. L'impact négatif du reclassement de SNCF Réseau sur les soldes serait ainsi quasiment compensé par les améliorations observées s'agissant des administrations de sécurité sociale et du compte d'affectation spéciale Transition énergétique.

Second élément qui complique notre lecture, les trois années 2017 à 2019 sont marquées par deux opérations budgétaires exceptionnelles de grande ampleur.

La première est le remboursement de la taxe de 3 % sur les dividendes en 2017 et 2018 à la suite de son invalidation par le Conseil constitutionnel et sa compensation, sur la seule année 2017, par une surtaxe exceptionnelle sur l'impôt sur les sociétés. Cette mesure représente 0,2 point de produit intérieur brut (PIB) en 2018.

La seconde est la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) en baisse de cotisations au 1er janvier 2019. Cette mesure représente 0,9 point de PIB en 2019.

Ces deux opérations n'influenceront plus les comptes publics au-delà de 2019. Si on les neutralisait, le scénario d'évolution de la situation des finances publiques proposé par le Gouvernement induirait une réduction du déficit public d'environ 0,3 point en 2018 et 0,5 point en 2019. La réduction en 2018 et 2019 se partagerait à peu près également entre une amélioration de la composante conjoncturelle et une amélioration du solde structurel.

J'en viens à notre appréciation sur les prévisions de recettes et de dépenses formulées par le Gouvernement.

S'agissant des recettes tout d'abord, les prévisions pour l'année 2018 sont en phase avec les informations dont nous disposons. En particulier, la prévision émise sur les recettes fiscales nettes de l'État est cohérente avec les encaissements observés à ce stade de l'année.

Le Gouvernement retient une élasticité des prélèvements obligatoires au PIB de 1,1 en 2018. Cette élasticité supérieure à l'unité serait essentiellement due à l'évolution plus dynamique que le PIB de la masse salariale, sur laquelle sont assises les cotisations sociales et une grande part des prélèvements sociaux.

Pour 2019, le Gouvernement prévoit une élasticité unitaire des prélèvements obligatoires à la croissance.

Au total, pour 2018 comme pour 2019, le Haut Conseil considère que les prévisions de prélèvements obligatoires sont réalistes au regard du scénario macroéconomique retenu.

S'agissant des dépenses, leur augmentation globale présentée dans le PLF hors crédits d'impôt pour 2018 est de 1,6 % en valeur et de 0 % en volume en retenant pour déflateur, comme le font usuellement tous les gouvernements, l'indice des prix à la consommation hors tabac. En 2019, l'objectif d'évolution des dépenses des administrations publiques hors crédits d'impôt et hors opérations exceptionnelles augmente. Il est de 1,9 % en valeur et de 0,6 % en volume. Corrigé de l'indice des prix du PIB, indice moins volatil que celui des prix à la consommation hors tabac, la dépense progresserait en volume de 0,7 % en 2018 comme en 2019.

Le Haut Conseil relève que des efforts visant une budgétisation plus réaliste des dépenses de l'État ont été effectués depuis le PLF pour 2018, notamment sur les opérations relevant des ministères de la défense et de l'intérieur. Toutefois, des risques de tensions dans l'exécution budgétaire au cours de l'année 2019 peuvent demeurer. Dans le contexte d'un maintien en PLF pour 2019 d'un taux de mise en réserve à 3 % hors dépenses de personnel, ces risques nécessiteront une exécution rigoureuse de l'ensemble des dépenses pilotables de l'État.

Pour leur part, les dépenses des administrations de sécurité sociale seraient en légère décélération en 2019 par rapport à 2018, de 1,8 % contre 2,0 % en valeur.

Les dépenses de retraites et de certaines prestations sociales hors minima sociaux seraient ainsi modérées par une revalorisation de 0,3 % contre une inflation estimée par le Gouvernement à 1,4 % l'année prochaine.

Enfin, les dépenses des administrations publiques locales augmenteraient en 2018 et 2019 de 2,3 %, soit un rythme proche de celui observé en 2017 qui s'établissait à 2,5 %. De ce fait, la capacité de financement des administrations publiques locales continuerait à progresser.

Le Gouvernement fait l'hypothèse du respect, en 2018 comme en 2019, de l'objectif d'évolution de la dépense locale de fonctionnement, pour partie décliné dans un cadre contractuel. Les informations disponibles à ce jour indiquent en effet une évolution modérée de la dépense locale de fonctionnement en 2018, à un rythme proche de celui attendu par le Gouvernement. Une incertitude demeure toutefois concernant la vigueur de l'investissement local en 2018 et 2019 dans cette phase du cycle électoral, compte tenu des marges de manoeuvre ainsi dégagées.

En résumé, la prévision de dépense formulée par le Gouvernement repose sur des efforts de maîtrise de la part de l'ensemble des administrations – État, sécurité sociale et collectivités locales. Pour 2018 comme pour 2019, le Haut Conseil estime toutefois que cette perspective d'évolution est atteignable.

Notre institution considère donc que la prévision de déficit public pour l'année 2019 est plausible, compte tenu du scénario macroéconomique retenu et des baisses de prélèvements décidées pour 2019. Notre appréciation repose néanmoins sur la stricte tenue de la trajectoire de dépense envisagée à ce jour.

J'en viens à présent à la cohérence des projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale examinés par le Haut Conseil avec les orientations pluriannuelles de solde structurel.

Cette cohérence s'apprécie au regard de la trajectoire de solde structurel formulée dans la dernière loi de programmation des finances publiques, celle du 18 janvier 2018.

Le déficit structurel est proche de la trajectoire fixée en loi de programmation. Le Haut Conseil constate ainsi que les prévisions de solde structurel associées au PLF pour 2019 ne font pas apparaître d'écart important par rapport à la trajectoire de la loi de programmation pour les années 2018 à 2022.

L'ajustement structurel, c'est-à-dire la variation du solde structurel d'une année sur l'autre, s'élève à 0,1 point de PIB en 2018 et à 0,3 point en 2019.

L'effort structurel qui, je le rappelle, représente la partie de l'ajustement structurel directement liée à un effort en dépense ou à des mesures nouvelles de prélèvements obligatoires, serait nul en 2018. Pour être plus précis, l'effort réalisé sur la dépense serait compensé par l'impact des baisses de prélèvements. En 2019, l'effort structurel serait de 0,3 point de PIB.

Pour autant, le Haut Conseil relève que le Gouvernement n'a pas comptabilisé en opération ponctuelle et temporaire la mesure d'augmentation du cinquième acompte de l'impôt sur les sociétés prévues en 2019, dont l'effet est pourtant limité à cette seule année 2019. En l'état des informations dont nous disposons, cette mesure, dont le rendement est estimé à 1,5 milliard d'euros, est donc considérée par le Gouvernement comme contribuant à l'amélioration du solde structurel. Le Haut Conseil estime pour sa part qu'il serait logique de la classer en opération ponctuelle et temporaire, son impact étant limité au seul exercice 2019.

Si tel était le cas, l'effort structurel comme l'ajustement structurel seraient minorés de l'ordre de 0,1 point de PIB en 2019 par rapport à la présentation du Gouvernement. Ils seraient donc plus proches de 0,2 point de PIB que de 0,3 point.

Cependant, même si cette mesure avait été classée comme temporaire, l'écart entre le déficit structurel présenté dans le cadre de ce PLF et la trajectoire définie par la loi de programmation ne serait pas « important » au sens de l'article 23 de la loi organique relative à la programmation et la gouvernance des finances publiques – c'est-à-dire au moins égal à 0,5 point.

Ces chiffres doivent également s'apprécier au regard des engagements européens que la France a pris. À ce titre, le Haut Conseil souligne que les ajustements structurels prévus pour 2018 et 2019, qui seront soumis à l'appréciation de la Commission européenne, sont inférieurs au minimum prévu dans le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance, qui correspond à un ajustement de 0,5 point par an, sachant, comme je l'ai dit, que nous exprimons, pour notre part, des doutes sur le chiffre de 0,3 point avancé par le Gouvernement.

Le Haut Conseil avait déjà relevé, dans son avis relatif à la loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022, que la trajectoire définie par cette loi s'écartait des engagements européens de la France.

Voilà pour les principaux éléments développés dans l'avis formulé par le Haut Conseil. J'en terminerai avec une remarque générale en cohérence avec les observations antérieures que nous avions faites.

Dans le scénario proposé par le Gouvernement, le déficit nominal des comptes publics resterait proche de 3 points de PIB à l'horizon 2019. Toutefois, une fois neutralisé l'impact de la transformation du CICE en baisse de cotisations, le déficit nominal se réduirait sensiblement. Mais cette réduction serait due, pour plus de la moitié, à la conjoncture économique favorable dont bénéficient les finances publiques nationales.

Le déficit structurel de la France, qui se situe aux alentours de 2 points de PIB, demeure donc à un niveau nettement plus élevé que celui de la plupart de nos partenaires européens. La moyenne des déficits structurels des pays membres de la zone euro se situe en effet aux environs de 0,5 % du PIB en 2018, contre 2,2 % en France.

Ce déficit structurel ne se réduirait que lentement au regard des règles européennes. Comme vous le savez, la France se situe désormais dans le volet préventif du pacte de stabilité et de croissance. Dans ce volet, les pays membres doivent s'assurer de la convergence à un rythme suffisant vers leur objectif de moyen terme de solde structurel. Or, la France reste loin de son objectif, fixé à 0,4 % du PIB. Notre pays est actuellement l'un des membres le plus éloignés de leur objectif de moyen terme.

Par ailleurs, la France n'aurait pas encore amorcé, à l'horizon de 2019, la réduction de son ratio de dette publique au PIB, à la différence de la quasi-totalité des pays européens, qui ont déjà entamé depuis plusieurs années cette réduction de leur dette.

Malgré une certaine amélioration, la situation de nos finances publiques constitue toujours une fragilité de notre économie. Avec une dette qui approche 100 % du PIB et qui a progressé de plus de 30 points de PIB depuis la crise de 2008, la France ne dispose que de marges de manoeuvre limitées pour faire face à un éventuel fort ralentissement de l'activité économique, alors que le contexte international est marqué par des incertitudes particulièrement élevées.

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