Intervention de Olivia Gregoire

Séance en hémicycle du vendredi 28 septembre 2018 à 9h30
Croissance et transformation des entreprises — Article 16

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaOlivia Gregoire, présidente de la commission spéciale :

Je suis très heureuse qu'on en arrive à l'examen de cet article 16. J'espère que ce n'est pas cette perspective qui a fait fuir le public des tribunes !

Il est vrai que le sujet est un peu particulier. Voyez un peu : « Votre mari n'a pas de bon sens, disait Grandet en prêtant une somme à madame des Grassins, moyennant sûretés ». Cet extrait de l'Eugénie Grandet de Balzac témoigne de l'ancienneté de l'instrument qu'est la sûreté, qu'on utilise encore aujourd'hui.

Selon une définition littéraire, la sûreté est le caractère de ce qui est sûr, dont il ne fait aucun doute qu'il aura lieu, mais dans son acception juridique elle désigne une institution rendant le rapport d'obligation sûr entre un créancier et son débiteur. Comme il n'y a que des spécialistes au sein de cet hémicycle, je ne détaillerai pas plus le droit des sûretés.

L'article 16 peut sembler aride, voire rebutant à première vue. C'est pourtant, j'en suis absolument persuadée, l'un des articles les plus importants de ce texte, l'un des plus riches en enjeux structurants.

Le Gouvernement nous demande de l'habiliter à réformer par ordonnances le droit des sûretés. Quiconque s'est un jour intéressé aux procédures collectives dans notre pays – vous en parliez, monsieur Ramos, et vous aussi monsieur Jumel, monsieur Vallaud – et quiconque évidemment en a vécu une, comme vous la décriviez monsieur Kasbarian, a cherché à comprendre la logique qui présidait à l'ordre des créanciers ou aux règles et aux exceptions de notre régime des sûretés. Tout le monde est convaincu de la nécessité d'en passer par là. Combien de dispositions de ce droit des sûretés peuvent sembler aujourd'hui ineptes ? Combien sont d'évidence parfaitement désuètes, ne correspondant plus aux réalités économiques actuelles ? Combien nous paraissent même aller tout à la fois à l'encontre des droits des créanciers, des débiteurs et des pouvoirs publics ?

C'est la pérennité de milliers d'entreprises qui est ici en jeu, mais aussi les droits de créanciers qui ne sont pas tous de grands établissements de crédit, ainsi que l'intérêt de débiteurs qui ont souvent mis dans la balance les gains de toute une vie.

Les vingt-quatre mois qui nous sont demandés par le Gouvernement ne seront pas de trop tant les questions soulevées par ce droit et cette réforme des sûretés sont nombreuses, techniques et stratégiques et tant ces améliorations sont attendues par tous les acteurs concernés, malgré la technicité du sujet.

J'appelle sincèrement de mes voeux une implication au long cours des parlementaires dans cette réforme, et je leur fais confiance. Certes les questions sont complexes, mais elles sont bien trop importantes pour dépendre de décisions prises dans les couloirs, loin du regard politique des parlementaires que nous sommes.

À réforme ambitieuse, dispositif ambitieux. Pour une meilleure protection des débiteurs, pour une meilleure prise en compte des intérêts des créanciers, pour une véritable réflexion sur la place de l'État, des PME et des actionnaires dans notre système de sûretés, cet article est majeur.

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