Intervention de Anne-Marie Leroyer

Réunion du jeudi 6 septembre 2018 à 10h20
Mission d'information sur la révision de la loi relative à la bioéthique

Anne-Marie Leroyer :

La Cour européenne des droits de l'homme a déjà confirmé à plusieurs reprises dans sa jurisprudence que le système français d'accès aux origines personnelles était proportionné au but poursuivi, en particulier pour les enfants nés sous X. Je ne pense donc pas que nous puissions être condamnés.

Faut-il légiférer pour consacrer l'accès des enfants à leurs origines personnelles ? Dans le rapport que j'ai rendu avec Irène Théry, nous sommes extrêmement favorables à l'accès aux origines personnelles, non pas compte tenu de l'évolution des techniques modernes – génétiques notamment – mais pour des raisons d'identité personnelle, élément mis en avant par la Cour européenne des droits de l'homme. Au regard de l'analyse de sa jurisprudence, comme de celle de la Cour de cassation, la notion d'identité personnelle est très large : elle recouvre notre état civil – notre identité « objective », notre filiation – mais renvoie aussi à ce que tout un chacun ressent – son identité « subjective » et son désir de connaître ses origines. À l'avenir, il est probable que cette notion d'identité entendue à la fois objectivement et subjectivement se renforce et que la CEDH évolue dans un sens beaucoup plus strict. Elle condamnera alors les États qui n'admettraient pas l'accès aux origines personnelles, sur le fondement de la consécration de plus en plus large de cette notion d'identité subjective – ce que la Cour appelle l'« accès à la connaissance de ses ascendants ». Il ne s'agit alors pas des ascendants au sens du droit de la filiation, mais des géniteurs. La Cour fait de la connaissance des géniteurs une question d'identité personnelle.

L'évolution des techniques est évidemment très importante, mais ce n'est pas parce que des banques de données génétiques permettent d'apprendre ses origines sur internet que le législateur doit s'incliner et suivre ces évolutions technologiques. Ce n'est pas parce que la technique permet une évolution que la loi doit l'autoriser. En revanche, l'évolution de la notion d'identité pourrait bien nous y conduire si le besoin que tout un chacun ressent de se connaître, et donc de connaître ses origines personnelles, se renforce.

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